30 Novembre 2014
Nous autres gens des rues
Chaque petite action est un événement immense où le Paradis nous est donné, où nous pouvons donner le paradis.
Qu’importe ce que nous avons à faire : un balai ou un stylo à tenir ; parler ou se taire ; raccommoder ou faire une conférence ; soigner un malade ou taper à la machine.
Tout cela n’est que l’écorce d’une réalité splendide, la rencontre de l’âme avec Dieu,
à chaque minute renouvelée, à chaque minute accrue en grâce, toujours plus belle pour son Dieu.
On sonne ? Vite, allons ouvrir.
C’est Dieu qui vient nous aimer.
Un renseignement ? Le voici :
c’est Dieu qui vient nous aimer.
C’est l’heure de se mettre à table : allons-y :
c’est Dieu qui vient nous aimer.
Laissons-le faire.
Madeleine Delbrêl, La Sainteté des gens ordinaires, tome VII des O.C., Nouvelle Cité 2009, pp. 29-30. © Amis de Madeleine Delbrêl
Madeleine Delbrêl, La Sainteté des gens ordinaires, tome VII des O.C., Nouvelle Cité 2009, pp. 29-30. © Amis de Madeleine Delbrêl
Assistante sociale à Ivry-sur-Seine, Madeleine Delbrêl (1904-1964) a témoigné d’une vie évangélique en milieu ouvrier et déchristianisé. Elle a créé un lien impensable à l’époque entre chrétiens et communistes. Ceux qui l’ont connue se souviennent de celle qui est devenue l’une des grandes figures spirituelles de notre temps.
Un jour de plus commence.
Il ne s’est pas enfermé.
Il a marché parmi les hommes.
Avec moi il est parmi les hommes d’aujourd’hui.
Il va rencontrer
chacun de ceux qui entreront dans la maison,
chacun de ceux que je croiserai dans la rue,
d’autres riches que ceux de son temps,
d’autres pauvres,
d’autres savants et d’autres ignorants,
d’autres petits et d’autres vieillards,
d’autres saints et d’autres pécheurs,
d’autres valides et d’autres infirmes.
Tous seront ceux qu’il est venu chercher.
Chacun, celui qu’il est venu sauver.
A ceux qui me parleront,
il aura quelque chose à répondre ;
A ceux qui manqueront,
il aura quelque chose à donner.
Chacun existera pour lui comme s’il était seul.
Dans le bruit il aura son silence à vivre.
Dans le tumulte, sa paix à mouvoir.
Jésus en tout n’a pas cessé d’être le Fils.
En moi il veut rester lié au Père.
Doucement lié, dans chaque seconde,
balancé sur chaque seconde
comme un liège sur l’eau.
Doux comme un agneau
devant chaque volonté de son Père.
Tout sera permis dans le jour qui va venir,
tout sera permis et demandera que je dise oui.
Le monde où il me laisse pour y être avec moi
ne peut m’empêcher d’être avec Dieu ;
comme un enfant porté sur les bras de sa mère
n’est pas moins avec elle
parce qu’elle marche dans la foule.
Jésus, partout, n’a cessé d’être envoyé.
Nous ne pouvons pas faire que nous ne soyons,
à chaque instant,
les envoyés de Dieu au monde.
Jésus en nous ne cesse pas d’être envoyé,
au long de ce jour qui commence,
à toute l’humanité, de notre temps, de tous les temps,
de ma ville et du monde entier.
A travers les proches frères
qu’il nous fera servir, aimer, sauver,
des vagues de sa charité partiront
jusqu’au bout du monde,
iront jusqu’à la fin des temps.
Béni soit ce nouveau jour, qui est Noël pour la terre,
puisqu’en moi Jésus veut le vivre encore.
Madeleine Delbrêl
(Humour dans l'amour, Tome III des Oeuvres Complètes, p59)