Nous savons que la guerre ne fait aucune différence entre les parties. Il y a toujours la mort, la terreur, les blessures, psychologiques et corporelles. Pour notre part, ici à Alep, depuis le 12 janvier, nous comptons 17 morts parmi les civils -dont beaucoup d’enfants et de femmes- et plus de cent blessés. Je me demande toujours : s’il en est ainsi à Alep, à cause des missiles qui tombent sur la ville, qu’en sera-t-il à Idleb en terme de morts et de blessés?
Reste-il encore des chrétiens dans la province d’Idleb? Avez-vous des contacts avec eux?
Il y a une communauté de 700 chrétiens, de plusieurs confessions : latins catholiques, grecs-orthodoxes, et arméniens. Il n’y a plus aucun prêtre, hormis 2 prêtres latins, deux frères franciscains qui ont toujours vécu là-bas et qui ne veulent pas quitter le peuple. La situation actuelle, comme par le passé, est terrible: beaucoup de limites, de mesures, des persécutions… Et en même temps, il y a la volonté de ne pas quitter les terres et les maisons, de continuer à prier ensemble et de porter la croix, avec l’espoir de jours meilleurs.
Ces limites et cette persécution dont vous parlez, sont-elles imposées par les groupes jihadistes?
Oui, il faut par exemple éliminer les croix autour des églises, aucune visibilité n’est permise pour les chrétiens, même pour les frères, qui ne peuvent pas porter l’habit religieux ; tous les signes de religiosité sont interdits. Les femmes doivent se couvrir le corps et la tête. Il y a également beaucoup de mesures qui limitent les mouvements et touchent à la vie quotidienne.
Dimanche, lors de l’Angélus, le Pape a lancé un appel pour les civils d’Idleb. Avez-vous été touché par cet appel, qui n’est d’ailleurs pas le premier?
J’ai vraiment été beaucoup touché. Chaque fois que j’écoute le Pape qui intervient (sur la Syrie), je suis plein de consolation. D’abord parce que nous avons besoin de quelqu’un qui parle à la communauté internationale, laquelle, je le crois, n’a pas tiré les leçons des deux guerres mondiales, ni des autres conflits.
Nous, communautés, qui vivons dans la persécution et les difficultés, nous nous sentons consolés, nous sentons que notre père, le Pape François, partage nos souffrances; et par son appel, c’est toute l’Église universelle qui est proche de nous, qui prie et n’oublie pas les chrétiens et les Syriens de toutes les confessions.