22 Juin 2020
Le Saint du Jour est une liste quotidienne des Saints gardés dans la mémoire de l'Église. Les histoires des maîtres de la vie chrétienne de tous les temps qui comme des phares radieux orientent notre chemin.
Saint-Siège
(Aubin, Alban, Albain, Albane, Albans, Albe), martyrisé à Verulam ou Verulanium (en 287?), actuellement la ville de St Albans, au nord de Londres(*).
Les Anglais voient en lui leur premier martyr.
Son biographe, Bède le Vénérable, dit de lui qu'il était un païen charitable qui avait recueilli chez lui à Verulanium, un prêtre chrétien poursuivi par la police. Celui-ci le convertit et le baptisa.
Quand les policiers arrivèrent, ils arrêtèrent saint Alban qui, pour sauver le prêtre, avait revêtu son uniforme religieux. Il fut mis à mort à sa place.
(*) information fournie par un internaute qui nous écrit: "Saint Alban était au Moyen Âge dans le diocèse de Londres et elle est elle-même devenue cathédrale et siège diocésain depuis la Renaissance. Par ailleurs la forme Auban est beaucoup plus rare que la forme Alban, y compris en Angleterre où ce culte est le plus développé. En France, le culte de saint Alban a sans doute été développé par l'évêque saint Germain d'Auxerre au Ve siècle."
- La ville où il vivait, dans le Hertfordshire, porte son nom, et possède une ancienne église abbatiale, devenue cathédrale.
Il y a un village Saint-Auban dans les Alpes-Maritimes, dans la vallée de l'Esteron, un bourg nommé Saint-Auban dans les Alpes-de-Haute-Provence, dans la vallée de la Durance et un village de Saône-et-Loire (71) Saint-Albain.
Informations aimablement communiquées par le diocèse de Digne:
Albanus, en français Alban, Auban, quelquefois Albin, est né à Vérulam, à 30 kilomètres, au nord de Londres, fut martyrisé en l'an 304; sa fête figure, dans le martyrologe romain au 22 juin.
Le poète Venance Fortunat, qui vivait dans la Gaule méridionale à la fin du VIe siècle écrivait de lui : «La gloire de son triomphe a été si éclatante qu'elle s'est répandue dans toute l'Église».
En Grande-Bretagne, autour du sanctuaire élevé en son honneur, se trouve la ville de Saint-Albans, (Voir pour les détails: La revue des Saints N°51, juin 1931)
Lyon a une paroisse sous le titre de Saint-Albans.
Saint-Alban, côtes d'Armor: Saint-Alban doit son nom au premier martyr insulaire de Vérulamium, devenu depuis Saint-Alban (à 50 km de Londres). Condamné et exécuté le 22 juin de l'an 209. Il est le patron de l'église paroissiale.
Saint-Auban est chef-lieu de canton dans les Alpes-Maritimes. Il y a Saint-Auban sur l'Ouvèze, dans la Drôme; Saint-Auban d'Oze, dans les Hautes-Alpes. Dans les Alpes de Haute Provence, au terroir de la commune de Château-Arnoux, un quartier porte, de temps immémorial, le nom de Saint-Auban.
d'après le livre du Père Corriol, ancien Curé de Saint-Auban, 1ère Edition 1939, 2ème Edition 1947, 3ème Edition 1957
À Verulam en Grande Bretagne, vers 287, saint Alban, martyr. On rapporte que, soldat non encore baptisé, il avait recueilli dans sa maison un clerc qui lui donna les enseignements de la foi chrétienne. En changeant d'habit, il se livra lui-même à la place de son hôte, et pour ce motif, subit la flagellation, des tourments atroces et fut décapité.
Saint Paulin
Évêque de Nole
(354-431)
P |
Paulin avait vingt-quatre ans quand il épousa Thérésia, opulente patricienne, pieuse chrétienne, dont l'influence rapprocha peu à peu son époux de la vérité et le conduisit au baptême. Ses relations avec le célèbre saint Martin, grand thaumaturge des Gaules, qui le guérit miraculeusement d'une grave maladie des yeux, contribua beaucoup aussi à tourner ses pensées vers la beauté de la perfection chrétienne. Il reçut le Baptême et goûta enfin la paix qu'il cherchait depuis longtemps. La mort de son jeune enfant, nommé Celsus, porta de plus en plus le nouveau chrétien au mépris des biens de ce monde.
Son immense fortune lui était à charge ; il s'en dépouilla en faveur des pauvres, croyant que “ le véritable riche est celui qui compte sur Dieu et non celui qui compte sur la terre” et que “ celui qui possède Jésus possède plus que le monde entier”. Dès lors Paulin et Thérésia, tout en vivant dans une union parfaite, pratiquèrent la continence. Ces nouvelles jetèrent l'étonnement dans tout l'empire ; à l'étonnement succédèrent les dérisions, les reproches, le mépris. Paulin, en revanche, voyait sa conduite exaltée par tout le monde chrétien et recevait les éloges des Ambroise, des Augustin, des Jérôme et des Grégoire.
Il fut ordonné prêtre en 393, et alla se fixer à Nole, en Italie, où il fit de sa maison une sorte de monastère. En 409, le peuple de Nole l'acclama comme évêque. Son épiscopat est célèbre par un acte de dévouement devenu immortel. Une pauvre veuve avait vu son fils unique emmené prisonnier par les barbares ; elle va trouver Paulin, le priant de racheter son enfant : “Je n'ai plus d'argent - dit le pontife - mais je m'offre moi-même.” La pauvre femme ne pouvait le croire, mais il l'obligea à se rendre avec lui en Afrique, où il se livra en échange du prisonnier. Au bout de quelques temps, la noblesse du caractère et les vertus de Paulin intriguèrent son maître ; il fut obligé de se découvrir, et le barbare, confus d'avoir pour esclave un évêque, lui donna sa liberté avec celle de tous les prisonniers de sa ville épiscopale. Sa réception à Nole fut un triomphe.
Saint Thomas More
Martyr
(1478-1535)
T |
En 1501, Thomas More était reçu avocat et élu membre du Parlement trois ans plus tard. Après quelques années de mariage, il perdit sa femme et demeura seul avec ses quatre enfants : trois filles et un fils. Parce que ses enfants étaient encore très jeunes, et qu'il était toujours absent de chez lui, par ses affaires au tribunal et à la cour du roi, il se remaria tout de suite, avec une veuve, au grand scandale de certains. En père vigilant, il veillait à ce que Dieu restât le centre de la vie de ses enfants. Le soir, il récitait la prière avec eux ; aux repas, une de ses filles lisait un passage de l'Écriture Sainte et on discutait ensuite sur le texte en conversant gaiement. Jamais la science, ni la vertu, ne prirent un visage austère dans sa demeure ; sa piété n'en était cependant pas moins profonde. Thomas More entendait la messe tous les jours ; en plus de ses prières du matin et du soir, il récitait les psaumes quotidiennement.
Sa valeur le fit nommer Maître des Requêtes et conseiller privé du roi. En 1529, Thomas More remplaça le défunt cardinal Wolsey dans la charge de Lord chancelier. Celui qui n'avait jamais recherché les honneurs ni désiré une haute situation se trouvait placé au sommet des dignités humaines. Les succès, pas plus que les afflictions, n'eurent de prise sur sa force de caractère.
Lorsqu’Henri VIII voulut divorcer pour épouser Anne Boleyn et qu'il prétendit, devant l'opposition formelle du pape, se proclamer chef de l'Église d'Angleterre, Thomas More refusa de signer l'acte de suprématie. Dès lors, les bonnes grâces du roi se changèrent en hostilité ouverte contre lui. Le roi le renvoya sans aucune ressource, car Thomas versait au fur à mesure tous ses revenus dans le sein des pauvres. Le jour où il apprit que ses granges avaient été incendiées, il écrivit à sa femme de rendre grâces à Dieu pour cette épreuve.
Le 13 avril 1534, l'ex-chancelier fut invité à prononcer le serment qui reconnaissait Anne Boleyn comme épouse légitime et rejetait l'autorité du pape. Thomas rejeta noblement toute espèce de compromis avec sa conscience et refusa de donner son appui à l'adultère et au schisme.
Après un second refus réitéré le 17 avril, on l'emprisonna à la Tour de Londres. Il vécut dans le recueillement et la prière durant les quatorze mois de son injuste incarcération. Comme il avait fait de toute sa vie une préparation à l'éternité, la sérénité ne le quittait jamais. Il avoua bonnement : « Il me semble que Dieu fait de moi son jouet et qu'Il me berce. »
L'épreuve de la maladie s'ajouta bientôt à celle de la réclusion. Devenu semblable à un squelette, il ne cessa cependant de travailler en écrivant des traités moraux, un traité sur la Passion, et même de joyeuses satires. L'intensité de sa prière conservait sa force d'âme : « Donne-moi Ta grâce, Dieu bon, pour que je compte pour rien le monde et fixe mon esprit sur Toi. » Il disait à sa chère fille Marguerite : « Si je sens la frayeur sur le point de me vaincre, je me rappellerai comment un souffle de vent faillit faire faire naufrage à Pierre parce que sa foi avait faibli. Je ferai donc comme lui, j'appellerai le Christ à mon secours. »
On accusa Thomas More de haute trahison parce qu'il niait la suprématie spirituelle du roi. Lorsque le simulacre de jugement qui le condamnait à être décapité fut terminé, le courageux confesseur de la foi n'eut que des paroles de réconfort pour tous ceux qui pleuraient sa mort imminente et injuste. À la foule des spectateurs, il demanda de prier pour lui et de porter témoignage qu'il mourait dans la foi et pour la foi de la Sainte Église catholique. Sir Kingston, connu pour son cœur impitoyable, lui fit ses adieux en sanglotant. Il récita pieusement le Miserere au pied de l'échafaud. Il demanda de l'aide pour monter sur l'échafaud : « Pour la descente, ajouta-t-il avec humour, je m'en tirerai bien tout seul. » Il embrassa son bourreau : « Courage, mon brave, n'aie pas peur, mais comme j'ai le cou très court, attention ! Il y va de ton honneur. » Il se banda les yeux et se plaça lui-même sur la planche.
Thomas More a été béatifié le 29 décembre 1886, par Léon XIII (Vincenzo Gioacchino Pecci, 1878-1903), et canonisé le 19 mai 1935, par Pie XI (Ambrogio Damiano Ratti, 1922-1939).
Saint Jean-Paul II le déclara Patron céleste des Responsables de gouvernement et des hommes politiques en l'année jubilaire 2000.
INTERVENTION DU CARDINAL ROGER ETCHEGARAY
Saint Thomas More ou l’éloge de la conscience
A l'approche du Jubilé de tous ceux qui ont des responsabilités politiques, c'est un grand cadeau que Jean-Paul II fait en leur donnant comme patron céleste saint Thomas More: un patron de grande envergure à la mesure de ceux qui ont à gérer la "chose publique". Ce geste spirituel a été suggéré par des femmes et des hommes de tous horizons politiques dans les divers continents. Parmi les motifs qui l'ont fait accéder à leurs requêtes, Jean-Paul II affirme: "Ce fut justement dans la défense des droits de la conscience que l'exemple de Thomas More brilla d'une intense lumière". Et il ajoute que son initiative est "en pleine syntonie avec l'esprit du grand Jubilé qui nous introduit dans le troisième millénaire chrétien".
Quand le Pape Pie XI canonisa Thomas More en 1935 (deux ans avant les Encycliques contre le national-socialisme et le communisme) il lâcha ce simple mot: "Quel homme complet!", reprenant par ailleurs la définition qu'Erasme donnait de son ami: "omnium horarum hominem": "un homme pour toutes les heures".
De fait, avocat à la City de Londres, membre à 27 ans du Parlement dont il devint le speaker, puis Lord Chancellier du Royaume, premier laïc à assumer cette haute charge, Thomas More a fasciné ses contemporains de toute l'Europe. Charles Quint disait qu'il aurait préféré perdre les meilleures villes de son Empire que d'être privé d'un seul de ses conseils. Figure centrale de l'humanisme, il reçoit dans sa célèbre maison de Chelsea les grands noms de la Renaissance, d'Erasme à Holbein le Jeune qui fit son portrait. L'auteur de l'étonnante "Utopie" cultive les arts mais porte le cilice. Homme plongé dans les affaires les plus complexes, mais père affectueux proche de ses quatre enfants et paroissien assidu à la messe quotidienne. Il vit pleinement le programme évangélique: être dans le monde sans être du monde. Il assume le double rôle de Marthe et de Marie.
A 55 ans, au faîte de sa gloire et de sa puissance, il démissionne. Pour motif de conscience. Pour ne pas fermer les yeux sur des injustices flagrantes. Trois ans après, c'est la prison durant quinze mois au cours desquels il écrit son dernier livre sur la Passion du Christ, puis c'est la décapitation, pour avoir refusé avec courtoisie mais fermeté de céder à l'arbitraire de son Roi qui cherchait à asservir l'Eglise à l'Etat. C'était le 6 juillet 1585. La veille, dans sa dernière lettre (écrite au charbon de bois) à sa fille Margaret, il explique pourquoi il est heureux de donner sa vie ce 6 juillet: c'est l'octave de la fête de saint Pierre, "roc" de l'unité romaine que Henri IV avait osé attaquer et puis, c'est la veille de la fête de saint Thomas Becket, l'Archevêque de Canterbury martyrisé dans sa cathédrale au XII siècle pour la défense de la liberté religieuse.
Il gravit les marches de l'échafaud appuyé sur les bras du lieutenant de la Tour, en lui disant "Je vous prie, aidez-moi à monter; pour ce qui est de la descente, je m'en tirerai tout seul". Quinze jours avant la décapitation de l'homme d'Etat, un homme d'Eglise avait subi le même sort, John Fisher, Evêque de Rochester; et tous deux sont honorés aujourd'hui ensemble dans le calendrier des saints.
Tous, anglicans comme catholiques, ont vu d'abord en lui non seulement un saint, mais un héros de la conscience et un martyre de la foi. Et tous les hommes politiques, quelle que fut leur croyance ou incroyance, l'ont considéré comme un des plus grands représentants des traditions juridiques dont l'Angleterre est à bon droit très fière.
Jean-Paul II, en proclamant maintenant Thomas More patron des gouvernants et des politiciens, veut leur rappeler la primauté absolue de Dieu jusqu'au sein des affaires publiques. Dans un temps d'éclipse de la conscience, le Pape nous montre à tous un homme qui a préféré la mort à la vie par fidélité à sa conscience, à une conscience qu'il n'a cessé d'éclairer à la lumière de Dieu et des conseils des sages, loin de tout fanatisme et de tout subjectivisme. Il n'est pas facile de faire l'éloge de la conscience et de témoigner de sa valeur suprême; car elle exige des soins constants de formation, de maturation pour que l'homme découvre en cela "la présence d'une loi qu'il ne s'est pas donnée lui-même et à laquelle il est tenu d'obéir" (Gaudium et spes n. 16).
A lire les émouvantes lettres écrites par Thomas More dans sa prison, nous comprenons mieux à quel point l'obligation de conscience, qu'il a posée à l'encontre de toutes les autorités établies, émergeait de sa sainteté.
A découvrir et imiter Thomas More, chacun de nous se sentira plus homme parce que plus appelé à la sainteté, plus libre, parce que plus détaché de tout, plus joyeux, parce que plus amoureux de tous.
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En 1913, saint Pie X prescrit que toutes les cathédrales fêtent l'anniversaire de leur dédicace à une date distincte de la dédicace des autres églises.
En 1915, Mgr Maurin, évêque de Grenoble, fixe au 22 juin la dédicace de son église cathédrale connue sous le vocable de Notre-Dame dès le VIIe siècle.
L'église cathédrale est l'église-mère de toutes les églises du diocèse et le siège de l'évêque représentant le Christ pour diriger le Peuple de Dieu.
- cathédrale Notre-Dame de Grenoble
Mgr de Kérimel célèbrera la messe la messe en l’anniversaire de la dédicace de la Cathédrale
Homélie prononcée le 22 juin 2020
Frères et sœurs,
nous entendons ce matin un extrait de l’évangile selon saint Matthieu qui vient à la fin d’un long discours où le Christ parle à ses disciples de leur future mission et des épreuves qu’ils auront à subir, non seulement de la part des autorités politiques, des gouverneurs et des rois, mais également à l’intérieur de leur propre famille. Quand le Christ leur dit : « ne craignez pas les hommes, rien n’est voilé qui ne sera dévoilé, rien n’est caché qui ne sera connu », il encourage ses disciples à supporter les persécutions plus ou moins étouffées ou cachées, en leur disant qu’un jour, tôt ou tard ces persécutions seront connues de tous.
Aujourd’hui nous savons qu’il y a des pays où des disciples du Christ sont persécutés, tués, décapités, massacrés à cause de lui, et cela est clairement établi et indéniable, alors même que certains voudraient ne pas trop en parler. Mais le Christ dit à ses disciples : « n’ayez pas peur, ne craignez pas ceux qui ont le pouvoir de tuer le corps sans pouvoir tuer l’âme », c’est-à-dire ceux qui martyrisent les croyants mais qui ne parviennent pas à éradiquer leur foi. Rappelons-nous ce que disait le grand écrivain chrétien Tertullien, au IIIe siècle : « le sang des martyrs et semence de chrétiens » (Apologie 50,13). L’évangile nous parle de ces persécutions que des chrétiens subissent aujourd’hui au Proche-Orient ou en Afrique ou en d’autres pays.
En Europe les choses sont plus feutrées. Les maux que les disciples du Christ ont à subir sont beaucoup plus cachés, pour reprendre le terme de Jésus. Et lorsque le Seigneur ajoute : « craignez plutôt celui qui peut faire périr l’âme aussi bien que le corps », nous pouvons penser que la société dans laquelle nous sommes est capable de faire périr notre âme. Les structures prolifèrent qui éloignent de l’Evangile, et les pratiques et les dérives qui détournent de Dieu font que l’âme croyante, l’âme chrétienne, est soumise à rude épreuve, et peut connaître une véritable destruction spirituelle à cause des addictions en tout genre, à cause des abus de pouvoirs et des blessures qu’ils provoquent, mais aussi à cause des idéologies matérialistes et athées pour qui la vraie religion est celle de la croissance et du marché, du confort et du progrès, Dieu étant alors facultatif ou optionnel, tandis que les plus pauvres sont perçus comme un mal nécessaire.
Voilà tout ce qui, dans notre monde de production et de consommation, peut tuer nos âmes de croyants qui sont tournées vers l’amour gratuit, vers la vie spirituelle qui n’est pas de ce monde mais qui est en nous, et qui nous ouvre à la transcendance de Dieu et à notre propre éternité, toutes choses que peut-être, Frères et Sœurs, le confinement nous a invités à considérer avec un regard nouveau, non seulement nous, mais aussi nos contemporains, tant il est vrai que, pendant les deux mois d’arrêt brutal de cette course où nous sommes engagés, nous avons eu l’impression, avec nos concitoyens, que nous redécouvrions ce qui était nécessaire, essentiel, et ce qui l’était moins ou même ce qui ne l’était pas, et dont il fallait bien se passer.
Pendant les mois que nous venons de traverser, toutes ces activités frénétiques se sont arrêtées net pour lesquelles c’est habituellement l’augmentation, le chiffre et l’enrichissement qui sont la règle, l’horizon, l’avenir, l’espérance.
Et, tout d’un coup, il a fallu revenir à des questions fondamentales sur le sens et sur le but de notre existence, tout simplement parce que nous étions confinés chez nous, bloqués dans nos habitations, et restreints dans nos libertés de mouvements et de vie sociale.
Bien entendu, notre nourriture matérielle est essentielle. Et les crises économiques sont bien réelles. Mais la question de savoir ce que nous faisons sur terre et où nous allons est aussi réelle que ces crises, et même davantage encore. Et cette question est une question de notre âme, Frères et Sœurs, pas une question de notre corps. C’est une question qui nous montre que notre âme existe, notre âme humaine en quête de sens et d’éternité qui montre que nous ne sommes pas des animaux conduits par leurs instincts et leur psychologie animale. Cette âme humaine qui est la nôtre, elle est notre dignité. C’est notre liberté spirituelle. C’est notre cœur ouvert à l’amour de Dieu et de nos frères les plus humbles et les plus pauvres quels qu’ils soient. Et, vous le savez, pendant ce confinement, ce sont surtout les associations caritatives qui ont fonctionné pour pallier l’absence des autres services habituels, publics ou privés.
Eh bien, cette âme que nous avons qui est tournée vers le Seigneur lorsque l’on est croyant, cette âme, l’évangile nous dit que Dieu notre Père veille sur elle. Et quand le Christ prend l’exemple des oiseaux qui ne tombent pas à terre sans que Dieu le sache, il parle ainsi pour nous rassurer, pour nous inviter à la confiance : « même les cheveux de votre tête sont comptés. Soyez sans crainte ». Cette vie spirituelle qui est en nous, cette prière, cette foi, cette espérance et cette charité, Dieu veille sur elles.
Mais, en même temps, le Christ nous redit que nous en sommes responsables, car, justement, nous sommes libres. Lorsque le Seigneur Jésus, après avoir évoqué le Père qui veille sur nous, évoque aussitôt les choix fondamentaux que nous pouvons faire pour Dieu pour contre Dieu, il ne se contredit pas. Jésus insiste simplement sur le fait que Dieu qui veille sur nous ne prend pas notre place quand nous nous tournons vers lui ou quand nous nous détournons de lui. C’est bien nous qui choisissons et qui décidons, pas lui. Là est la grandeur de notre vie, la grandeur de notre cœur d’hommes et de femmes qui n’est pas quelque chose d’accidentel ou superficiel, mais qui est quelque chose de profond.
Quand le Christ parle de ceux qui se déclarent pour lui devant les hommes, il ne parle pas d’un cœur à cœur avec lui pendant un moment passager, ponctuel, vite balayé par les épreuves de la vie. Non. Il parle d’une attitude de fond. Et semblablement, lorsqu’il parle de le renier, il ne parle pas simplement de Pierre dans la nuit de la Passion qui renie son maître devant l’horreur de l’agonie et de la croix. Non. Le Christ parle d’une attitude répétée, durable, profonde, où l’on se détourne de Dieu en disant « il n’existe pas, il faut s’en éloigner, cette idée est un phantasme… », tournons-nous vers ce que saint Paul appelle notre « chair », notre bien-être et nos jouissances dans la vie de ce monde.
Vous le voyez, Frères et Sœurs, dans cet évangile d’aujourd’hui, le Seigneur nous prévient que notre destin éternel est entre nos mains, à tout instant, dès cette terre, et que, si le Père veille sur nous, il ne prend pas notre place lorsqu’il nous demande d’adhérer à sa vie et de ne pas nous engager dans la mort. Voilà cette grandeur dramatique de notre liberté devant Dieu qui va jusque dans l’éternité. Mais voilà, en même temps, cet amour, dramatique lui aussi, d’un dieu qui va se livrer pour nous, qui va faire l’expérience de notre mort pour que nous comprenions jusqu’où il nous aime, afin que nous acceptions sa présence dans notre vie, et que nous lui donnions la première place.
« Rien n’est voilé qui ne sera dévoilé » veut dire aussi que la relation que vous avez avec moi maintenant, dans le secret de votre cœur, sera un jour dévoilée en pleine lumière. Vous paraîtrez pour le jugement, et c’est sur votre amour que vous serez jugés, votre amour pauvre ou riche, ouvert ou fermé.
Voilà ce jugement qui se fera sur nos capacités d’aimer, d’aimer la vie, d’aimer le Seigneur, de faire aimer la vie autour de nous, de faire aimer le Seigneur autour de nous, et de faire aimer l’ouverture du cœur à une espérance éternelle.
Demandons au Seigneur ce matin la grâce de nous sentir responsables de l’avenir spirituel de notre monde, non pas simplement de notre propre sanctification, de notre propre salut, mais de la sanctification de notre monde tel que nous le connaissons, tel qu’il peut nous agresser, nous persécuter. Mais intercédons pour que ce monde que Dieu aime tant, et qui a crucifié son fils unique, s’ouvre à sa bonté, reçoive son amour, et goûte combien Dieu est son Père, combien ce ciel dont nous parle le Christ est déjà sur la terre, pour nous élever au-dessus de nous-mêmes et, en nous rapprochant de lui, nous rapprocher les uns des autres, afin que nous vivions cette fraternité pour laquelle le Christ a donné sa vie, et dans laquelle nous progressons chaque dimanche, d’Eucharistie en Eucharistie. Amen.
Père Patrick Faure