27 Novembre 2020
Vayetsé
Matérialité vs. Spiritualité ?
Le judaïsme, y compris la philosophie ‘hassidique, a toujours évoqué la lutte entre la spiritualité et la matérialité. La spiritualité vise à sublimer la matière, alors que la matière a une tendance à « tomber » vers sa source, ce qui signifie pour l’homme qu’elle induit en lui une tendance innée au matérialisme.
Le Tanya évoque la guerre intérieure entre les deux « rois » – le bon et le mauvais penchant – qui se disputent la « petite cité » qu’est la personnalité humaine, avec pour enjeu le fait d’être aux commandes des facultés corporelles, émotionnelles et cognitives dans le but, pour l’un, de donner un sens divin à sa vie, et pour l’autre, d’assouvir ses désirs égoïstes.
Dans notre génération, tout en étant l’héritier de cette tradition, le Rabbi de Loubavitch a révélé une approche profondément novatrice de cette dichotomie : préfigurant l’harmonie universelle qui caractérisera l’ère messianique, il a enseigné que la matérialité n’est pas, en soi, l’ennemie de la spiritualité. C’est seulement le fait de vivre une vie fragmentée et désunie qui en fait des rivales. Non seulement la matérialité peut-elle être ralliée à la cause de la spiritualité, mais elle est essentiellement une avec elle. Plus encore : elle est la condition de son aboutissement.
Un exemple de cela apparaît dans la lecture de la Torah de cette semaine, Vayetsé : à la naissance de Zebulon, son sixième fils, Léa s’écrie que désormais Jacob fixera sa résidence principale auprès d’elle (Genèse 30,20).
Il est étonnant que Zebulon soit si étroitement associé à Jacob, car ils semblent représenter tous deux des chemins opposés. Jacob est défini comme « un homme intègre, assis dans les tentes de l’étude de la Torah » (Genèse 25,27), alors que Zebulon est celui qui « occupera le littoral des mers » (Deutéronome 49,13), en allant commercer avec les peuples de la Méditerranée.
Pourtant, c’est précisément Zebulon qui apportera la preuve que l’engagement des Enfants d’Israël envers la Torah est fixe, pérenne et indéfectible. C’est en restant fidèle à la Torah et aux mitsvot malgré les préoccupations inhérentes à ses activités, malgré la difficulté des voyages et l’interaction avec des sociétés idolâtres que la tribu de Zebulon a démontré que la sainteté est ancrée dans l’âme juive, démonstration que ne pouvaient faire ceux qui demeuraient en Terre Sainte.
La leçon pour nous est claire : alors que, comme le Rabbi l’a annoncé, nous vivons les derniers instants de l’exil, sachons, comme Zevouloun, être investis dans le monde du travail tout en fixant des temps pour l’étude de la Torah, et révéler ainsi que la Torah est fixée en nous de manière éternelle.
Shabbat Chalom !
Emmanuel Mergui
au nom de l’équipe éditoriale de Chabad.org
Le combat du Rabbi pour la Délivrance
par Menahem Brod
Il n’est pas aisé de présenter, dans le cadre concis d’un texte comme celui-ci, l’œuvre grandiose du Rabbi pour tout ce qui a trait à la délivrance et à la venue du Machia’h. On peut affirmer que ce thème fut la quintessence même de tout ce qu’il accomplit tout au long de sa vie. Il n’y eut jamais un discours, une dissertation ‘hassidique, une parole dans lesquels le Rabbi omit de mentionner la délivrance. Quiconque a eu le mérite d’approcher le Rabbi peut témoigner que l’attente de la délivrance messianique et le désir de hâter la venue du Libérateur étaient au centre de toutes ses préoccupations et à l’origine de tous les accomplissements qu’il a réalisés dans le monde.
On peut cependant tenter de définir quelques aspects dominants de la perception que le Rabbi avait de la Délivrance à travers leur expression dans son enseignement et dans l’action qu’il mena.
Le « Talon du Machia’h »
Concrètement, c’est à l’époque du Rabbi « Rayats » (acronyme de Rabbi Yossef Its’hak Schneerson, 1880-1950, beau-père et prédécesseur du Rabbi), que l’expectative relative à la Délivrance prit des proportions largement accrues par rapport à ce qui prévalait au préalable. Pendant les années effroyables de la Shoah, le Rabbi Rayats lança de nombreux appels à la prise de conscience des enjeux de l’époque, publiés dans sa correspondance.1.
Le Rabbi Rayats fit alors la proclamation suivante : « À techouva immédiate, délivrance immédiate ! » Il expliqua que les terribles souffrances que vivait le peuple d’Israël étaient les « douleurs de l’enfantement du Machia’h » et que, grâce à la techouva, la Délivrance serait immédiate. Il précisa, en outre, que la présente période était « véritablement celle du “talon du Machia’h” ». Il souligna l’importance de conduire tous les enfants d’Israël à la techouva afin d’obtenir cette Délivrance. C’est ainsi qu’il écrivit à l’époque dans l’une de ses lettres2 :
À cette époque-ci, qui est réellement celle du « talon du Machia’h », chaque Juif a l’obligation de rechercher le bien de son prochain, qu’il soit vieux ou jeune, de le conduire vers la techouva, afin qu’il ne s’écarte pas du peuple d’Israël, ce qu’à D.ieu ne plaise, et qu’il ait le mérite de prendre part à la Délivrance complète, avec l’aide de D.ieu béni soit-Il.
« Notre génération est la dernière de l’exil et sera la première de la Délivrance. »
Après le décès du Rabbi Rayats, le Rabbi poursuivit son action dans ce domaine et il la développa très largement au fil des années. Dans le premier discours ‘hassidique qu’il prononça après avoir pris la direction des ‘hassidim ‘Habad le 10 Chevat 5711 (1951), il indiqua que la présente génération est la septième depuis l’Admour Hazaken et la dernière, celle qui assistera à la Délivrance. Il déclara alors3 :
Voici donc ce que l’on attend de chacun d’entre nous, qui appartenons à cette septième génération et « tous les septièmes sont chéris ». Certes, nous n’avons pas choisi d’appartenir à cette septième génération ; ce n’est pas un effet de notre effort et, de différents points de vue, ceci va peut-être même à l’encontre de notre propre volonté. Malgré tout cela, tous les septièmes sont chéris et nous nous trouvons à l’heure actuelle dans la période du « talon du Machia’h », à la fin de cette période. Notre mission consiste donc à parachever la révélation de la Présence divine, bien plus, de Son aspect essentiel, et de l’obtenir précisément ici-bas, parmi les créatures inférieures.
En ces quelques lignes, le Rabbi définit la nature profonde de notre génération. Il souligne que nous n’avons pas fait le choix d’en faire partie et que, d’un certain point de vue, si nous avions été consultés à ce propos, peut-être ne l’aurions-nous pas voulu, mais, c’est un fait incontestable, nous sommes la génération de la période du « talon du Machia’h » et, bien plus, nous vivons à la fin de cette période. Notre mission consiste à achever la révélation de la Présence divine dans ce monde inférieur et d’y révéler la Délivrance. À de multiples reprises, le Rabbi a affirmé que notre génération est « la dernière de l’exil, qui sera la première de la Délivrance ».
La vision d’un enfant
À ce propos, il est judicieux de citer ici un extrait d’une lettre du Rabbi4 dans laquelle il révèle que la vision de la Délivrance lui est apparue dès sa plus tendre enfance, avant même qu’il commence à fréquenter l’école :
Depuis le jour de mon entrée à l’école ou même encore avant cela, l’image de la Délivrance future, de la libération du peuple d’Israël de ce dernier exil a commencé à prendre forme dans mon esprit. Une telle délivrance, qui se produira de telle façon qu’elle permettra de comprendre toutes les souffrances endurées pendant l’exil, les persécutions et les exterminations. Tout se passera alors d’une manière qui permettra de proclamer, avec un cœur entier et une compréhension parfaite « On dira, ce jour-là : je Te rends grâce, Eternel, car Tu m’as réprimandé. » (Isaïe 12,1)
La diffusion des sources ‘hassidiques
Au fil des années, on a pu remarquer que le Rabbi mettait l’accent sur différents aspects de la Délivrance, même s’il est clair que toutes ces idées à la fois, dans leur ensemble, conservent leur validité à chaque époque. En revanche, toutes ne sont pas soulignées de manière identique.
Pendant les premières années, le Rabbi prôna essentiellement la diffusion des sources de la ‘Hassidout à l’extérieur, afin de rapprocher la venue du Machia’h. Il basait son propos, notamment, sur une lettre bien connue du Baal Chem Tov5 dans laquelle celui-ci raconte une élévation de l’âme qu’il vécut. Il indique qu’il parvint alors dans le sanctuaire céleste du Machia’h et il l’interrogea :
« Quand le maître viendra-t-il ? »
Le Machia’h lui répondit :
« Lorsque tes sources se répandront à l’extérieur. »
« Nous voulons Machia’h maintenant ! »
Dans l’un de ses discours, prononcé le Chabbat ‘Hayé Sarah 5716 (1956),6 le Rabbi détaille brièvement l’aspect spécifique de chaque période depuis la création du monde jusqu’à nos jours et il conclut en soulignant à quel point il était essentiel de diffuser les sources de la ‘Hassidout à l’extérieur, car c’est précisément de cette façon que l’on révèle le Machia’h dans le monde. Il indiqua, notamment :
C’est la raison pour laquelle, à l’heure actuelle, la mission essentielle qui nous est confiée consiste à s’investir dans la diffusion des sources de la ‘Hassidout à l’extérieur. C’est de cette façon que l’on hâtera la révélation qui sera obtenue dans le monde, lors de la Délivrance véritable et complète, très bientôt et de nos jours, amen.
Les « mivtsaïm »
Par la suite, le Rabbi mit l’accent sur la nécessité d’aider chaque Juif à mettre en pratique les mitsvot afin que tous les fils et filles d’Israël soient prêts pour la Délivrance, que nul ne soit dénué de mitsvot, à D.ieu ne plaise, quand viendra le grand jour. Le Rabbi souligne cette idée à de multiples reprises à propos des différentes campagnes de diffusion des mitsvot qu’il lança au fil des années, les célèbres « mivtsaïm ». Celles-ci sont bien connues et elles ont permis à des centaines de milliers de Juifs de mettre en pratique de nombreuses mitsvot.
« We want Machia’h now ! »
En 1980, le Rabbi a commencé à souligner la nécessité pour le peuple d’Israël de demander et même d’exiger la Délivrance au Saint béni soit-Il. Au cours des rassemblements d’enfants dans sa maison d’étude, le Rabbi les encouragea à proclamer et à chanter « We want Machia’h now ! », « Nous voulons Machia’h maintenant ! ». Au cours des années suivantes, le Rabbi a multiplié les explications sur la nécessité de demander à D.ieu la Délivrance, de s’écrier devant le Saint béni soit-Il : « Ad mataï ? », « Jusqu’à quand durera cet exil ? » et de Le supplier d’accorder la venue immédiate du Machia’h.
« La Délivrance est accessible et il suffit de se tenir prêt à accueillir notre juste Machia’h. »
Le Rabbi fait également référence à « ceux qui cherchent à contrer », selon sa propre expression, à ceux qui se moquent de ce besoin de demander à D.ieu qu’il accorde la Délivrance. Et le Rabbi apporte lui-même une réponse aux objections diverses et variées. Il répond, tout d’abord, à ceux qui affirment qu’il ne nous appartient pas de demander la Délivrance et que D.ieu l’enverra quand bon Lui semblera ainsi qu’à ceux qui prétendent que clamer « Jusqu’à quand durera cet exil ? » tombe sous le coup des paroles de nos Sages à propos des personnes qui cherchent à hâter la Délivrance avant l’heure.
Le Rabbi répond donc à toutes ces attaques dans les moindres détails et il établit sans ambiguïté, avec toute la clarté qui le caractérise, que ces objections n’ont nullement lieu d’être. Il dit notamment7 :
Il est bien évident que toute cette démarche n’a rien à voir avec le fait de provoquer la Délivrance. Il ne s’agit pas, en l’occurrence, de « Kabbalah pratique » ou « d’assermenter des anges », mais uniquement de l’étude de la Torah et de la pratique des mitsvot dans la joie et en accroissant cette pratique.
Ceci inclut aussi, bien évidemment, la nécessité de réfléchir au sens littéral des mots que l’on prononce pendant la prière, lorsque l’on se tient devant le Saint béni soit-Il. On Lui demande alors : « Puissent nos yeux assister à Ton retour à Sion dans la miséricorde » et « Fais germer promptement la pousse de David, Ton serviteur ». Il faut donc vouloir tout cela sincèrement, puis se poser la question : « Qu’ai-je fait aujourd’hui pour l’obtenir ? »
De même, dans une discours du Chabbat Ki Tetsé 5748 (1988),8 le Rabbi déclare :
Il ne s’agit en aucune façon de provoquer la Délivrance, car son temps est déjà arrivé.
« Le temps de votre Délivrance est arrivé »
Peu avant l’année 5750 (1989-90), le Rabbi adopte encore une nouvelle stimulation : « Le temps de votre Délivrance est arrivé. » Jusqu’à cette date, le Rabbi soulignait la nécessité de réaliser des actions spécifiques afin d’obtenir la Délivrance, de développer l’étude de la Torah, la pratique des mitsvot et la prière afin d’être apte à la recevoir et pour la hâter. Désormais, il affirme qu’elle est disponible et qu’il suffit de se tenir prêt à accueillir notre juste Machia’h.
1989-1990 : « une année de miracles. »
À l’approche de l’année 5750, le Rabbi la proclame : « Année des miracles » et il souligne que l’écriture en lettres hébraïques du nombre 5750 – tav-chine-noun – correspond aux initiales de la phrase Tehé Chnat Nissim, signifiant : « Ce sera une année de miracles. » Dès l’été 5749 (1989), il annonce que de grands miracles se produiront alors, précisant que le monde entier en sera témoin. C’est alors que se produit une évolution profonde en Europe de l’Est, l’effondrement du régime communiste, la libération de centaines de milliers de Juifs jusqu’alors prisonniers derrière le Rideau de fer. Le Rabbi voit en tout cela des indices confirmant l’imminence de la Délivrance.
Puis, cette orientation se poursuit et se renforce quand éclate la crise qui aboutit à la Guerre du Golfe. Le Rabbi déclare alors,9 :
Les événements liés à la crise du Golfe font partie des signes de la Délivrance.
Et il applique à ces événements les termes du Midrache Yalkout Chimoni :
« L’année en laquelle se révélera le roi Machia’h, le roi de Perse lancera un défi au roi d’Arabie. »10
Le Rabbi déduit de la suite de ce passage du Midrache qu’au final le peuple d’Israël connaîtra la sécurité et qu’il ne doit pas craindre les affres de la guerre :
« Le Saint béni soit-Il dit à Israël : Mes enfants, ne craignez rien, tout ce que J’ai accompli, Je l’ai fait uniquement pour vous. N’ayez pas peur ! Le temps de votre Délivrance est arrivé ! »11
Le refus de l’exil
En ces années-là, le Rabbi souligne à de multiples reprises que rien ne peut justifier la longueur de cet exil et qu’il est incompréhensible que la Délivrance n’ait pas été d’ores et déjà obtenue. Il dit notamment en 5748 (1988)12 :
Des dizaines d’années se sont écoulées, mais notre juste Machia’h n’est pas encore venu. Rien ne peut le justifier !
Bien souvent, quand il lance une nouvelle campagne de diffusion des mitsvot ou quand il appelle à un certain ajout à la Torah et aux mitsvot, le Rabbi rappelle aussitôt que la Délivrance tarde, qu’on ne sait pas ce qui fait obstacle à la venue de notre juste Machia’h et qu’il faut donc agir par tous les moyens possibles car peut-être accomplira-t-on ainsi la toute dernière réalisation, celle qui déclenchera tout le processus de la Délivrance.
Le Rabbi prononçait toujours ces mots avec une immense douleur. Bien souvent, quand il évoquait la longueur de l’exil, sa voix était étranglée par un sanglot retenu. Quand il traitait des problèmes communautaires, il savait s’exprimer avec la plus grande fermeté, communiquant ainsi sa puissance et sa détermination à ses émissaires et à ses ‘hassidim à travers le monde. En revanche, quand il parlait de la longueur de l’exil, de la Présence divine qui est exilée, des « enfants qui ont été congédiés de la table de leur Père », il pleurait et sa voix se brisait.
L’imminence de la Rédemption
Les expressions du Rabbi affirmant la présence effective de la Délivrance atteignirent leur paroxysme dans les années 5751 et 5752 (automne 1990 à automne 1992). C’est ainsi que, durant le Chabbat Parachat Balak, en Tamouz 5751 (1991), le Rabbi déclara13 :
Nous nous trouvons d’ores et déjà au seuil du commencement de la période messianique, au début du processus de la Délivrance. Et, nous en aurons immédiatement la suite et la perfection.
« Ce qui manque, c’est uniquement qu’un Juif ouvre les yeux et constate que tout est déjà prêt pour la Délivrance. »
Par la suite, le Rabbi expliqua que l’on devait étudier les lois relatives au Temple, cette année-là, pendant les Trois Semaines de deuil séparant le 17 Tamouz du 9 Av, non pas « par la force du sentiment de deuil, mais bien avec la conscience, avec une totale conviction, qu’il ne s’agit pas d’une halakha que l’on mettra en application dans un lointain avenir, mais bien dans l’instant suivant, car le Temple du monde futur que nous attendons est d’ores et déjà construit et prêt là-haut. Il se révélera immédiatement et il viendra du ciel, en un clin d’œil. »
Juste avant la fête de Soukkot 5752 (1991), le Chabbat parachat Haazinou, 13 Tichri, le Rabbi souligna la nécessité de célébrer les réjouissances de cette fête, Sim’hat Beth HaChoéva, avec une joie immense et toute particulière. Il explique14 :
Cette année, Sim’hat Beth HaChoéva doit être célébrée dans la plus grande joie, en relation avec la Délivrance véritable et complète. On doit se réjouir et danser pour aller à la rencontre de notre juste Machia’h.
Durant le Chabbat parachat ‘Hayé Sarah, 25 Mar’hechvan, qui bénit le mois de Kislev 5752, en présence de milliers de ses émissaires venus des quatre coins du monde et réunis dans sa maison d’étude, le Rabbi annonce15 :
Le seul accomplissement restant dans le cadre de la mission qui a été confiée est d’accueillir notre juste Machia’h d’une manière concrète afin que lui-même puisse mener à bien sa propre mission et libérer les enfants d’Israël de l’exil.
Le monde est prêt
Le sommet de ce processus fut atteint en Kislev 5752, le Chabbat parachat Vayétsé. Le Rabbi prononça alors des propos particulièrement surprenants et merveilleux. Il expliqua que le monde avait été entièrement transformé et affiné, qu’il était désormais un réceptacle à même d’intégrer la lumière de notre juste Machia’h et que, désormais, il fallait uniquement que chaque Juif ouvre les yeux. Il déclara alors16 :
D’après tous les signes qui ont été énoncés par nos Sages, nous nous trouvons véritablement dans l’étape de la Délivrance. Nous sommes d’ores et déjà dans la situation en laquelle le corps physique et même la matière du monde ont déjà été totalement transformés et affinés. Ils sont désormais un réceptacle pour toutes les lumières et tous les domaines spirituels. Ceci inclut, avant tout, la lumière de notre juste Machia’h, la lumière de la Délivrance véritable et complète. Ce qui manque, c’est uniquement qu’un Juif ouvre les yeux et constate que tout est déjà prêt pour la Délivrance.
À la même période, le Rabbi affirme17 :
Nous nous trouvons dans la période la plus haute pour la venue de notre juste Machia’h.
Et
C’est le temps le plus haut pour la Délivrance véritable et complète.
La Délivrance reste à venir
Il est important de souligner qu’en toutes ces expressions, le Rabbi parvint toujours à maintenir la distinction, certes mince, entre les signes de la Délivrance, son « avant-goût », sa préparation et la Délivrance proprement dite, qui n’a pas encore été obtenue, comme il l’a maintes fois souligné lui-même. Ainsi, le Chabbat parachat Vayéra 5751, le Rabbi dit18 :
Il faut ajouter un point et préciser que ces miracles et ces merveilles ne sont encore que la préparation de la Délivrance.
Il convient donc de ne pas faire de contresens sur les propos du Rabbi. Quand il dit que « la Délivrance est déjà là » ou « le roi Machia’h est déjà arrivé », il précise lui-même qu’il fait allusion à la préparation de la Délivrance, à la révélation spirituelle permettant de l’obtenir. Il souligne que tout a d’ores et déjà été accompli, que la Délivrance doit maintenant se réaliser et se dévoiler et que le Machia’h doit venir. Mais, il est bien clair que la Délivrance n’est pas encore effective.
Il n’y a là, bien entendu, qu’une évidence, mais le Rabbi l’exprime clairement, notamment dans l’une de ses dernières causeries, prononcée le 10 Adar Richon 5752 (1992)19 :
Les Juifs sont en exil depuis plus de dix-neuf siècles et le Machia’h n’est pas encore là. La mission confiée à la période de l’exil a été intégralement conduite à son terme, toutes les actions ont été réalisées et ce, de toutes les manières possibles, et l’on ne sait pas ce que l’on peut faire de plus. Entre-temps, s’écoule encore une semaine, encore un jour, encore un instant, mais nous n’avons pas encore obtenu la Délivrance véritable et complète d’une manière effective !
Il y a un autre point qu’il est également essentiel de souligner. Malgré son immense enthousiasme pour tout ce qui a trait à la Délivrance, le Rabbi n’a jamais calculé ou indiqué une date de la venue du Machia’h, pas même d’une manière allusive, à la différence de l’attitude que l’on a pu observer chez d’autres Grands du peuple d’Israël en d’autres générations ou même chez d’autres maîtres de ‘Habad. On ne retrouve rien de tout cela ni dans les écrits du Rabbi, ni dans ses propos.
C’est, notamment, ce que le Rabbi indique dans une lettre, publiée dans le Likoutei Si’hot20 :
Vous me faites part de ce que vous avez entendu, de déductions établies à partir des versets, d’allusions, etc. De façon générale, il n’y a pas lieu de faire de tels calculs. Cela ne concerne que ceux qui ont reçu une certaine tradition en la matière. On ne doit pas le faire, si ce n’est pas le cas. Chacun a foi en la venue du Machia’h et l’attend chaque jour, mais, simultanément, on doit tout faire pour hâter cette venue.
Se tenir prêt
Quel est donc l’objectif de cet immense mouvement de prise de conscience de la Délivrance qui fut introduit par le Rabbi ?
On peut penser que, tout comme il voulut mettre les mitsvot à la portée de chaque Juif, renforcer chaque domaine du Judaïsme qui devait l’être, il forma également ses ‘hassidim et ses disciples, il influença tout le peuple d’Israël en leur transmettant, de la manière la plus forte, le douzième des treize principes fondamentaux de la foi, définis par le Rambam, c’est-à-dire l’attente de la venue du Machia’h.
En effet, force est de constater que cette croyance avait été affaiblie, dans les dernières générations et nombreux étaient ceux qui considéraient la Délivrance et la venue du Machia’h comme hypothétiques, lointaines et détachées de la réalité. Le Rabbi insuffla donc au peuple juif une foi enflammée en la venue du Machia’h, dont il fit un événement concret, proche, devant se produire très bientôt et de nos jours.
« Un Juif doit vouloir la Délivrance et la demander. »
On peut ajouter à cela qu’en raffermissant l’attente de la Délivrance, le Rabbi intervint également pour la hâter et la rapprocher. En effet, l’anticipation de la Délivrance est un moyen de l’obtenir au plus vite. Elle est un mérite acquis au peuple juif, qui a la vertu de le libérer de l’exil.
Le Rabbi accordait donc une immense importance à cette attente de la Délivrance, qui renforce elle-même tous les domaines de la Torah et des mitsvot. C’est ce qu’il expliqua lui-même, à maintes reprises, notamment celle-ci21 :
Nous vivons les derniers instants avant la venue du Machia’h. Il n’est malheureusement pas venu, non pas que le temps n’en soit pas encore arrivé, mais parce qu’il manque toujours une action qui fera pencher la balance du monde du côté du bien et provoquera la Délivrance. Le besoin du moment est donc que chaque Juif, du plus petit au plus grand, médite à la Délivrance véritable et complète par notre juste Machia’h et agisse lui-même pour l’obtenir et influence son prochain en ce sens.
De même, quand un Juif a conscience de l’imminence de la Délivrance, quand il sait qu’elle est proche, qu’elle dépend uniquement d’un ajout de sa part à la Torah et aux mitsvot, il se renforce dans tous les domaines du Judaïsme et cela même hâte la Délivrance, comme l’expliquent le Rabbi22 :
Un Juif doit vouloir la Délivrance et la demander. Cette demande elle-même et la méditation à tout ce qui concerne la Délivrance contribuent grandement à améliorer le service du Créateur. Quand on dit aux Juifs que « Machia’h arrive » ou bien « Nous voulons Machia’h maintenant », on leur insuffle l’empressement et l’ajout d’un plus grand scrupule dans leur service de D.ieu afin que rien dans leur comportement ne fasse obstacle à la venue du Machia’h, ce qu’à D.ieu ne plaise.
Mais, il y a également là un aspect beaucoup plus important. Le Rabbi voyait de ses propres yeux que le temps de la Délivrance est effectivement arrivé, qu’un seul et unique point manque désormais : le peuple d’Israël doit se tenir prêt à accueillir notre juste Machia’h ! C’est la raison pour laquelle il évoquait toujours avec une immense douleur le retard de la Délivrance qui n’a pas la moindre justification. La Délivrance aurait dû être effective depuis bien longtemps déjà !
« Vivre » la Délivrance grâce à l’étude
Le Rabbi agissait, par toutes ses forces, pour inviter le peuple d’Israël à se préparer à accueillir notre juste Machia’h, à renforcer l’attente de la Délivrance, à augmenter la pratique de la Torah et des mitsvot. Il demande à chacun d’aborder tout cela avec une optique nouvelle et de commencer à vivre, d’ores et déjà la période du Machia’h. Il demande, notamment, d’étudier les parties de la Torah relatives à la Délivrance et à la venue du Machia’h, ce que l’on ne faisait pratiquement pas, au préalable et il explique que, de cette façon, on peut d’ores et déjà « vivre » cette Délivrance, qui est imminente. Le Chabbat parachat Balak 5751 (1991), le Rabbi dit23 :
Étudier les sujets de la Délivrance et de la venue du Machia’h
On évoque, dernièrement, un ajout particulier à l’étude de la Torah, des textes qui traitent de la Délivrance et du Machia’h. Toutefois, il n’y a pas uniquement là une pratique ayant la vertu de hâter et de rapprocher la venue du Machia’h et la Délivrance, mais aussi et surtout un moyen de commencer à vivre le Machia’h et la Délivrance, à vivre la période messianique, à avoir un comportement concret, par ses pensées, ses paroles et ses actions, qui soit adapté à cette période particulière, puisque nous sommes au seuil de la Délivrance et que l’on nous désigne le Machia’h du doigt en disant : « Voici, le roi Machia’h arrive. »
Aujourd’hui
Sans le moindre doute, le Rabbi poursuit encore, à l’heure actuelle, son combat profond pour la Délivrance véritable et complète. Sans le moindre doute, il ne connaît pas le repos, il n’a de cesse, il fait trembler les mondes supérieurs afin d’obtenir la Délivrance véritable et complète, conformément à l’objectif qu’il s’est lui-même fixé.
Nous vivons donc tous, à l’heure actuelle, avec la conviction profonde que, malgré les difficultés qui ont surgi, malgré les années douloureuses qui se sont écoulées, nous assisterons très prochainement à la réalisation des propos du Rabbi, à la venue effective de notre juste Machia’h. Alors, nos yeux assisteront à l’arrivée du juste libérateur, qui apportera, au peuple d’Israël et au monde entier, la Délivrance véritable et complète.
NOTES
1.
Iguerot Kodech Admor HaRayats vol. 5 p. 361 et les suivants indiqués en références.
2.
Ibid., p. 388.
3.
Séfer HaMaamarim Bati LeGani vol. 1 p. 31
4.
Iguerot Kodech vol. 12 p. 414.
5.
Imprimée notamment à la fin du Ben Porat Yossef, dans le recueil des lettres du Baal Chem Tov et de ses disciples et dans le Guinzei Nistarot vol. 1, paragraphe 65.
6.
Torat Mena’hem Hitvaadouyot vol. 15 p. 224.
7.
Likoutei Si’hot vol. 20 p. 384
8.
Séfer HaMaamarim 5748 vol. 2 p. 628.
9.
Séfer HaSi’hot 5751 vol. 1 p. 73.
10.
Yalkout Chimoni Isaïe 499.
11.
Ibid.
12.
Séfer HaSi’hot 5748 vol. 2 p. 630.
13.
Séfer HaSi’hot 5751 vol. 2 p. 690.
14.
Hitvaadouyot 5752 vol. 1 p. 76.
15.
Hitvaadouyot 5752 vol. 1 p. 298.
16.
Hitvaadouyot 5752, vol. 1 p. 354.
17.
Séfer Hitvaaadouyot 5752 vol. 2 p. 149 et 268.
18.
Hitvaadouyot 5751 vol. 1 p. 292.
19.
Séfer HaSi’hot 5752 vol. 2 p. 406.
20.
Likoutei Si’hot vol. 23 p. 396.
21.
Hitvaadouyot 5747 vol. 2 p. 651.
22.
Likoutei Si’hot vol. 20 p. 234.
23.
Séfer HaSi’hot 5751 vol. 2 p. 691.
par Menahem Brod
Le Rav Menahem Brod est le porte-parole du mouvement de la Jeunesse Loubavitch en Israël et le rédacteur en chef de l'hebdomadaire "Si'hat Hachavoua".
Version adaptée d'un article du recueil "Etincelles de Perfection - Galerie de portraits du Rabbi de Loubavitch" – Ed. Beth Loubavitch
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