15 Février 2021
« Avec les enfants, remarquait saint François de Sales, on a besoin d’un petit verre de sagesse, d’un tonneau d’intelligence et d’un océan de patience ». Faut-il davantage d’intelligence que de sagesse pour éduquer les enfants ? Cela peut se discuter ! Mais il faut certainement de la patience à l’infini : patience envers les enfants, mais aussi envers nous-mêmes, envers les autres et, d’une certaine manière, envers Dieu. Trois idées reçues sur la patience.
« L’homme patient vaut mieux que le héros » (Pr 16, 32). La patience est donc plus importante que les actions d’éclats. Et pourtant, le plus souvent, elle passe inaperçue. On peut même dire que c’est le propre de la patience que de ne pas se faire remarquer. Quand les parents apprennent à leur enfant comment lacer ses chaussures, s’ils sont patients, ils prennent tout leur temps pour montrer à l’enfant les gestes à accomplir. Ils lui laissent la possibilité d’essayer plusieurs fois, ils lui réexpliquent et l’encouragent. En somme, ils semblent n’avoir que cela à faire et l’enfant ne remarque pas qu’ils accomplissent un grand effort de patience. S’ils montraient que cet effort leur coûte, en harcelant l’enfant de « dépêche-toi ! » ou en manifestant quelque agacement, ce ne serait plus de la patience, mais de l’impatience, plus ou moins bien maîtrisée.
Or la patience n’est pas l’impatience maîtrisée. L’impatience nous fait bouillir. À force de volonté, on peut étouffer cette ébullition, comme on met un couvercle sur une casserole. Apparemment, tout va bien, mais l’ébullition intérieure demeure : gare à l’explosion ! Et si on s’interdit toute explosion, elle se transforme en implosion : autrement dit, on retourne contre soi sa colère et son impatience. Cela peut ressembler à de la patience, mais ce n’en est pas car, un jour ou l’autre, extérieurement ou intérieurement, l’impatience va éclater et provoquer des dégâts.
Or la patience n’est pas l’impatience maîtrisée. L’impatience nous fait bouillir. À force de volonté, on peut étouffer cette ébullition, comme on met un couvercle sur une casserole. Apparemment, tout va bien, mais l’ébullition intérieure demeure : gare à l’explosion ! Et si on s’interdit toute explosion, elle se transforme en implosion : autrement dit, on retourne contre soi sa colère et son impatience. Cela peut ressembler à de la patience, mais ce n’en est pas car, un jour ou l’autre, extérieurement ou intérieurement, l’impatience va éclater et provoquer des dégâts.
La patience est un fruit de l’Esprit Saint : « Marchez sous la conduite de l’Esprit Saint » (Ga 5, 18). « Voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). La patience va de pair avec la maîtrise de soi mais toutes les deux découlent de la soumission à l’Esprit Saint. Pour être patients avec nos enfants, il faut commencer par tout remettre entre les mains de Dieu : leur éducation, leur avenir, ce que nous désirons pour eux, nos espoirs et nos difficultés, tout ce qui constitue notre mission de parents. La patience se conjugue au présent, comme l’amour. La patience nous rend pleinement « présents au présent » alors que l’impatience nous empêche de goûter l’instant d’aujourd’hui en nous faisant regretter que l’avenir ne soit pas déjà là.
La patience est inséparable de l’abandon à la Providence. Pourquoi sommes-nous impatients ? Bien souvent, c’est parce que nous avons peur. Peur que nos enfants ne soient pas heureux, peur qu’ils grandissent mal, peur de ne pas mener à bien notre mission de parents, peur de ne pas tenir le coup dans l’épreuve. Si nous réfléchissons bien, nous voyons que, le plus souvent, nos impatiences sont liées à des manques de confiance. Nous voudrions déjà tenir la victoire parce que, dans le fond, nous ne sommes pas sûrs qu’elle nous soit acquise. Notre impatience peut aussi venir du fait que nous voulions gagner sur tous les plans : nous voudrions Dieu et l’argent, la réussite de nos projets et la venue du Royaume. Notre cœur est tourmenté parce que divisé.
La patience ne se contente pas de « tuer le temps » en attendant la conversion ou les progrès. Elle encourage, pardonne, accompagne avec tendresse et compassion. Elle est le contraire de la résignation. Patienter, c’est espérer : c’est vivre pleinement l’aujourd’hui de Dieu parce que nous savons que, ressuscités avec le Christ, nous possédons déjà la victoire. Patienter, c’est prendre le temps de vivre cet aujourd’hui qui nous comble parce que, déjà, Dieu s’y donne à nous en plénitude. Patienter, c’est voir à travers les erreurs, les chutes et le péché lui-même, les signes de la miséricorde de Dieu, à jamais victorieux du mal et de la mort.
Christine Ponsard