Si cela s’avère exact, il s’agirait de la première preuve tangible de la présence d’un nom tiré des récits bibliques des juges sur un artefact contemporain de cette période.
L’inscription a été publiée lundi dans le cadre du deuxième numéro du Jerusalem Journal of Archaeology (JJAR) – un nouveau journal en ligne à accès libre – édité par le professeur Avraham Faust de Bar-Ilan, le professeur Yossef Garfinkel de l’Université hébraïque et la chercheuse Madeleine Mumcuoglu de l’Université hébraïque.
La poterie peinte est datée par les archéologues de 1100 avant l’ère commune, ce qui la situe avant la formation de la monarchie biblique. L’inscription a été écrite en alphabet précoce/Canaanéen, dont on trouve les traces à travers l’Egypte et le Levant. Les premières découvertes d’écriture paléo-hébraïque sont beaucoup plus tardives et remontent au 9e siècle avant notre ère.
Selon une équipe inter-institutionnelle d’archéologues et d’épigraphes, l’inscription partielle, peinte sur trois tessons de poterie provenant d’un petit récipient incomplet, se lit vraisemblablement comme « Jerubbaal » ou « Yerubaal », surnom du juge biblique Gédéon, fils de Joash, qui régnait sur le nord d’Israël à cette époque.
« Yerubaal est la lecture la plus logique et la plus vraisemblable, et je la considère comme quasi-définitive « , déclare le professeur Christopher Rollston, épigraphiste à l’université George Washington, qui a déchiffré le texte. » Je m’empresse d’ajouter que cette écriture est bien connue et largement authentifiée, ce qui nous permet de la lire avec précision. »
L’inscription s’ajoute à une poignée d’autres, d’une époque semblable, découvertes en Terre d’Israël. L’une des plus anciennes a été mise à jour dans les années 1970 à Izbet-Sarta, suivie par plusieurs autres inscriptions du 12e au 10e siècles d’avant l’ère commune, trouvées ces quinze dernières années, notamment à Tell eṣ-Ṣafi, Khirbet Qeiyafa, Jérusalem, Lachish.
Selon les archéologues, cette nouvelle inscription fait office de passerelle entre la culture cananéenne et les cultures israélite et judéenne.
« Pendant des décennies, on ne trouvait pratiquement aucune inscription de cette époque et de cette région. Au point que nous ne savions même pas à quoi ressemblait l’alphabet de cette époque. Il y avait un vide. Certains ont même affirmé que l’alphabet était inconnu dans la région, qu’il n’y avait pas de scribes et que la Bible devait donc avoir été écrite bien plus tard », explique Michael Langlois, épigraphiste et historien indépendant, au Times of Israel.
« Ces inscriptions sont encore rares, mais elles comblent peu à peu cette lacune. Non seulement elles documentent l’évolution de l’alphabet, mais elles montrent qu’il y avait en fait une continuité dans la culture, la langue et les traditions. Les implications pour notre compréhension de l’histoire biblique sont vastes – et passionnantes ! », ajoute M. Langlois, qui n’a pas participé aux fouilles actuelles.
Au Khirbet el Rai
L’inscription a été découverte sur le site de Khirbet el Rai, situé entre Kiryat Gat et Lachish, à environ 70 kilomètres au sud-ouest de Jérusalem. Depuis 2015, le site a été fouillé par le professeur Yossef Garfinkel de l’Université hébraïque de Jérusalem, Saar Ganor de l’Autorité des antiquités israéliennes, ainsi que par les docteurs Kyle Keimer et Gil Davies de l’Université Macquarie à Sydney.
Selon M. Ganor, le site comprend des structures de taille impressionnante datant des 12e, 11e et 10e siècles avant notre ère. « Si vous cherchez un parallèle biblique, nous parlons de l’époque des juges et du roi David », confie-t-il déclaré dans un film en hébreu de l’IAA.
En creusant parmi les vignobles de la région, l’équipe a trouvé des preuves d’un établissement de l’ère philistine datant des 12-11e siècles avant notre ère sous des couches d’un établissement rural datant du début du 10e siècle avant notre ère, largement considéré comme l’ère davidique. Parmi les découvertes, des structures massives en pierre et des artefacts culturels typiquement philistins, notamment des poteries dans des dépôts de fondation – des offrandes de bonne chance déposées sous le sol d’un bâtiment.
Ganor a ajouté qu’au cours des sept saisons de fouilles, ces centaines d’artefacts ont aidé à reconstituer la vie quotidienne des gens pendant l’ancienne période biblique. Parmi eux, cette « inscription inimaginable » qui a été trouvée dans l’un des 20 silos de stockage découverts sur le site.
L’archéologue Garfinkel a déclaré au Times of Israel que la datation de la pièce de poterie a été réalisée grâce à un ensemble de méthodes, notamment la datation au radiocarbone 14 de la strate juste au-dessus de la découverte – qui a donné un résultat de 1050 avant notre ère – la typographie des tessons de poterie portant l’inscription, et l’analyse pétrographique de ces derniers. Le professeur David Ben-Shlomo, de l’Université d’Ariel, qui a réalisé cette analyse, en a conclu que la petite cruche de la contenance d’un litre a été fabriquée localement.