Dans un village perdu du Berry, vivait un enfant loup au milieu des animaux. L’automne arrivait avec son dénuement saisonnier, et son tapis de feuilles mortes craque sous leurs pas. Les habitants de la forêt l’avaient adopté et protégé. Ils étaient tous, tacitement complice de ce gamin. De grands arbres centenaires côtoyaient les mûriers, les fraisiers, les framboisiers sauvages. Des oiseaux allez, venait, s’affairant pour l’hiver. Les orties, les fougères et la mousse, tapissaient les clairières tout au long de l’année. Ce val luxuriant attirait les touristes, mais pas ce bois si serré, plein de broussailles.
Le petit d’homme dormait dans le creux d’un vieux chêne. Les branches lui servaient d’escalier. Rosy et Brutus veillaient sur lui. Ils avaient creusé leur terrier au pied de son arbre. Son ami Tournus le lynx se pelotonner sur lui. Il lui servant de couverture. Ainsi, quelle que soit la saison l’enfant ne manqua de rien. Il était leur petit. Ils l’interpellaient ainsi.
Hé petit !
Pour tout et pour rien, souvent pour se rassurer. La peur des hommes, c’était inconsciemment et viscéralement incrusté au plus profond de lui. Ces cheveux roux couvraient sa nudité. Le bonheur d’un bain dans la rivière, sous la chute d‘eau de la cascade, faisait pari de ses jeux. Il y rencontrait Brunoy, le cerf. À l’heure de s’abreuver. Malgré l’odeur des loups, avec courage il est devenu prudemment son ami.
Rosy et Brutus ayant compris ce qui se passait avait conclu un marché avec le petit. Tous les amis du petit ne seront pas pris pour gibier, il leur faudra seulement reconnaître leurs odeurs pour ne pas les attaquer. Pour simplifier, l’odeur de l’enfant mêle aux odeurs du nouvel ami. Suffisait. Certaines années de bonheur s’écoulèrent.
Les journées se déroulent entre les jeux avec les louveteaux, les repas avec ses amis. La cueillette de fruits se fait avec Merlin le merle. Gaspard le renard lui montre les ruses de la survie. Le grand-duc lui enseigne les dangers de la nuit. Raoul le pigeon ramier lui apporte des graines de blé et prévient de l’arrivée des hommes. Colardo le col vert lui partage les joies de la rivière et de la nage. Mordicus le castor, lui, bâti une maison Ses parents adoptifs et la meute de loups le nourrit de leur chasse. Il est heureux.
Il ne connaît rien de la vie des hommes. Un jour tout changea. Il avait dix ans pour le monde des hommes. Pour ses amis cela faisait huit printemps qu’il vivait avec eux.
Le gamin s’est étourdiment éloigné de son gîte. Il remonte insouciant la rivière, il eut un malaise. Le garde-chasse explore la forêt, pour Monsieur le vicomte. D’ordinaire il ne va pas si loin. La forêt est si dense qu’aucun humain ne s’y aventure. Il trouve le petit, inanimé sur la rive à côté de deux squelettes humains. En voyant les cadavres, il court à son véhicule et téléphone à la police.
Les loups réalisent le problème. Comprenant que l’homme ne voulait que du bien à l’enfant, ils laissèrent l’homme agir. Ils pensent que le petit sera mieux près des siens. Leurs voix déchirent les bois. Puis tous redevient silencieux. L’homme avait pris sa carabine pour se protéger, se croyant attaqué. Un silence lourd s’abat, le garde-chasse comprend, qu’il n’est pas en danger. Rosy, Brutus, Tournus, Gaspard, Professeur, Colin, Colardo, Mordicus et Brunois cachés dans les broussailles observaient en silence. Se tapir dans ce bois sauvage, pour voir le départ de leur petit d’homme leur est un jeu d’enfant.
Le petit qu’ils ont élevé, protégé, s’en allait toujours inconscient. Une fois, que tout le monde fut parti, la forêt retrouva ses habitudes. La forêt est en deuil. à suivre