6 Décembre 2019
Saint Nicolas
Archevêque de Myre
(† 324)
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icolas, né probablement à Patare, en Lycie, en Asie mineure (actuelle Turquie) entre le 260 et 280, fut le fruit des prières de ses pieux parents.
Il eut l'esprit ouvert aux choses divines dès sa plus petite enfance ; à peine sut-il manger, qu'il sut jeûner. Il avait un oncle évêque, qui, voyant avec admiration les vertus de Nicolas, l'ordonna prêtre dès qu'il eut l'âge requis et fit de lui cette prédiction : « Il sera la consolation des affligés, le sauveur des âmes en péril, le bon pasteur qui rassemble ses brebis égarées au bercail de Jésus-Christ. »
Une de ses premières œuvres fut de sauver l'honneur de trois filles exposées à la perte de leur vertu ; il les dota toutes, l'une après l'autre, et il le fit si discrètement, que c'est à la fin seulement que le père, touché d'admiration, surprit la main du bienfaiteur.
Après un pèlerinage aux lieux saints, Nicolas se retira à Myre, espérant échapper aux honneurs qu'il voulait éviter avec tant de soin, et à la mort de l'évêque de Myre, qui arriva peu de temps après, il fut élu pour lui succéder. Dès lors il s'appliqua à devenir le modèle de son troupeau. Il ne mangea plus qu'une fois le jour, et jamais de viande ; il faisait toujours lire à sa table quelque livre de la Sainte Écriture ; ses nuits se passaient en oraison, et la terre dure était sa couche pour le peu de repos qu'il prenait. Levé avant le jour, il réveillait ses clercs pour chanter des hymnes et des psaumes ; aussitôt le soleil paru, il allait à l'église et employait le reste du jour à ses diverses fonctions pastorales.
Nicolas, sous la persécution de Dioclétien, fut jeté dans un cachot et mis à la torture ; mais on n'osa pas le faire mourir, par peur de la vengeance de son peuple.
Peu de saints ont opéré de plus nombreux et de plus éclatants miracles. Tantôt il apparaît à Constantin pendant la nuit, pour lui ordonner de mettre en liberté trois innocents qui doivent être exécutés le lendemain ; tantôt il se montre, en pleine tempête, à des matelots en danger qui l'ont appelé à leur secours. Il est surtout légendaire entre mille, le miracle de la résurrection de trois enfants tués par un boucher et hachés menu, pour être mêlés à la viande de son commerce.
On l'honore comme le patron des écoliers.
L’évêque de Myre, Nicolas, né vers 250 et mort un 6 décembre entre 329 et 350, symbolise le tournant radical que l’Incarnation imprime à l’Histoire. Persécuté sous Dioclétien, libre sous Constantin, il est le témoin de la conversion de l’Empire. Naturellement, il deviendra le protecteur des voyageurs, c’est-à-dire d’une humanité pérégrine, ouverte sur l’autre et l’ailleurs.
Adversaire résolu du paganisme et de l’hérésie arienne, il marque l’engagement de l’Église militante dans son temps, et s’impose comme un exemple de combat pour la foi par-delà la paix politique. Présent, selon de pieuses traditions, lors du premier concile œcuménique, à Nicée en 325, il se voit ainsi rattaché à la proclamation du dogme de la divinité du Christ. Ses miracles évoquent la Trinité : il sauve trois vierges de la prostitution, trois soldats de la prison et trois princes du bourreau.
Ce goût de l’universel qui parcourt son existence se retrouve à sa mort, lorsque sa sainteté, attestée par son corps incorruptible, source de baume et de guérison, se voit immédiatement vénérée aux quatre coins du monde, de la Syrie à la Palestine, puis l’Égypte, avant de gagner les Balkans, puis l’Europe, et enfin la Russie qui en fera son patron. Mais, deuxième lien à la Nativité, Nicolas est aussi un saint de l’enfance.
Lui-même prédestiné depuis le berceau, refusant ascétiquement le sein de sa mère les vendredis, reconnu dès l’adolescence comme un égal par les Anciens, il manifeste les desseins de la Providence à l’égard des plus petits. Mieux, comme le montrent les récits de l’enfant bouilli, étranglé ou disparu, il les ressuscite d’une mort en apparence consommée. C’est que dans l’attente de Noël, alors que le temps amorcé par la Toussaint semble sceller la victoire de la nuit, la fête du thaumaturge réveille l’éternelle jeunesse que la Création redécouvre sienne tandis que s’avance vers elle son Maître. Lui, le Roi céleste dont la lumière enfantine de la face brille sur le visage de son vieux serviteur Nicolas, prince des enfants.
En 1087, à Myre, des marins de Bari s’emparent des reliques du saint et les transfèrent au sud de l’Italie. Peu après, un croisé apporte un doigt du saint dans sa Lorraine natale ; la légende de Saint-Nicolas-de-Port est née. Au XIII e siècle, saint Bonaventure canonise la légende des trois enfants passés au saloir. En 1522, lors du siège de Metz, l’empereur Charles Quint sert à figurer le Père Fouettard, double négatif de Nicolas, protecteur des enfants.
Peu apprécié par la Réforme, le culte de l’évêque survit néanmoins aux Pays-Bas, où il est connu sous le nom de Sinterklaas. Les migrants hollandais vers Nieuw Amsterdam (future New York) y conservent la tradition festive. Notre héros prend alors le nom de Santa Claus et le culte chrétien devient la fête folklorique du Père Noël. En tournée la nuit du 24 décembre, notre héros est équipé d’un traîneau, fume la pipe, amuse la galerie. Pour entretenir le mystère, en 1885, les Américains l’habillent en rouge et fixent sa résidence au pôle Nord, semant la zizanie entre Scandinaves, Russes et Canadiens, qui le revendiquent tous. Les Finlandais parviennent à imposer leurs vues : Rovaniemi en Laponie devient la résidence officielle et… le siège d’un parc touristique.
Le rouleau compresseur de la société de consommation élargit le culte du don à la sphère familiale, puis amicale, voire sociale et politique. Noël devient un point fort du calendrier mondial, sauf dans les mondes musulman et chinois, où l’on se méfie de la gentillesse légendaire de saint Nicolas et de ses avatars, perçus comme les éléments d’une colonisation culturelle.