29 Mai 2020
Décès de l’humoriste et comédien Guy Bedos
« Il était beau, il était drôle, il était libre et courageux. Comme je suis fier de t’avoir eu pour père. Embrasse (Pierre) Desproges et (Jean-Loup) Dabadie, vu que vous êtes tous au Paradis », a-t-il écrit sur Instagram et Twitter.
Le décès de Guy Bedos survient en effet quelques jours après celui annoncé dimanche de son ami, le parolier Jean-Loup Dabadie, qui a notamment écrit pour lui le sketch « Bonne fête Paulette ».
Pied noir né à Alger en 1934, Guy Bedos s’est fait connaître grâce à des sketchs mordants, en duo d’abord avec Sophie Daumier qu’il épouse, dont celui consacré à la « drague » qui les révèle au grand public au début des années 1960.
Militant des invisibles
La consécration vient en 1968 avec un seul sur scène à Bobino, puis des rôles sur grand écran, très souvent devant la caméra d’Yves Robert. Ses plus grands succès sont Un éléphant ça trompe énormément (1976) et Nous irons tous au paradis (1977). Il travaille aussi pour Marcel Carné, Claude Berri ou Patrice Chéreau. Il s’est également produit dans de nombreux spectacles comiques, dont il est l’auteur, passe au Zénith, triomphe à l’Olympia avec Muriel Robin. Ils obtiennent la Victoire 93 de l’humoriste.
Ce grand angoissé, aux cheveux blanchis par les années et aux yeux noirs toujours espiègles, adorait aussi jouer les éditorialistes, s’en prenant aux hommes de pouvoir et défendant les sans-papiers et les sidérurgistes d’ArcelorMittal.
Marié 3 fois – avec Karen Blanguernon, Sophie Daumier (décédée en 2003) et Joëlle Bercot -, il est père de 4 enfants, Leslie, Mélanie, Victoria et Nicolas, devenu scénariste et réalisateur à succès.
Quand Guy Bedos a tenté de kidnapper l'écrivain Julien Gracq
En 1951, l'écrivain Julien Gracq refuse le prix Goncourt, pour son roman Le Rivage des Syrtes. Il entend ainsi d'annoncer les compromissions commerciales du monde littéraire. "Il y a des écrivains pour qui la manne publicitaire n'excuse pas tout. Un écrivain a le droit de choisir sa voie vers le public", se justifie-t-il alors dans la revue Art
Une première, qui fait scandale. À l'époque, toute la presse en parle. Les uns saluent son courage. Mais beaucoup dénoncent un coup de pub et une attaque injustifiée contre un prix respecté. Parmi les détracteurs de Julien Gracq, certains entendent même aller plus loin que les mots... "Ça a été un tel scandale que quelques jours après le refus public, un petit groupe de surréalistes a entrepris le projet de kidnapper Julien Gracq à la sortie du lycée où il enseignait, pour faire un happening, kidnapper celui qui ne voulait pas le Goncourt", racontait en novembre dernier l'écrivain Pierre Assouline, invité de La Voix est livre, sur Europe 1.
"Ils ont tiré au sort celui qui devait le kidnapper. C'est tombé sur le plus jeune d'entre eux, il avait 17 ans. Il était assez gringalet. Vous savez qui c'était ? Guy Bedos, l'humoriste qui est mort ce jeudi à l'âge de 85 ans. Le jour J, il s'est précipité sur Julien Gracq, qui l'a poussé. Julien Gracq lui a dit 'qu'est ce que vous voulez ?', et il est parti. Guy Bedos est resté tout penaud, comme l'a raconté Pierre Assouline sur Europe 1.
En 2007, un article de Libération évoquait cette histoire, peu connue. L'article parlait alors "d'enlèvement canularesque" pour "protester contre son refus jugé publicitaire" et affirme que Julien Gracq a "été sauvé par des journalistes". "On ne sait pas ce qu'ils [les kidnappeurs] voulaient en faire", précise toutefois Pierre Assouline, qui avance que Guy Bedos lui a confirmé l'histoire au téléphone.