Introduction
Bien que la mitsva centrale de la nuit du Séder soit
se souvenir de la Sortie d’Égypte
,1 celle-ci comprend également trois mitsvas
individuelles qui sont : consommer de la Matsa, du Maror
et l’agneau pascal (l’agneau n’est plus mangé).
Intéressons-nous à la mitsva de Maror, les herbes amères.
La source du Maror
Vous vous demandez pourquoi nous mangeons cela ?
Vous tenez le bon bout. Pendant le Séder de Pessa’h,
nous posons cette même question. Le texte de la
Haggadah répond en citant un verset de la Torah :
« Ils ont rendu notre vie amère avec un travail acharné ».
2 Le goût amer des herbes nous rappelle l’amertume
de notre esclavage en Égypte. La source réelle du
commandement biblique de manger du Maror se trouve
dans un verset ultérieur, où D.ieu nous commande de
faire l’agneau pascal : « Mangez [l’agneau] avec des
matsas et du Maror. »
3 La formulation de ce commandement est très précise.
: manger le Maror fait partie de la mitsva de l’agneau pascal.
4) Plutôt que d’être une mitsva indépendante, il s’agit
simplement d’une des conditions de la consommation de
l’agneau pascal.
5 Par conséquent, puisque nous n’avons plus l’obligation
d’offrir l’agneau pascal, Il n’y a pas d’ordre biblique de manger
du Maror. Cependant, même si la notion biblique de manger
du Maror pour rappeler notre esclavage ne s’applique plus,
6 les rabbins ont décrété que nous devrons quand même
manger du Maror pour nous souvenir de ce que nous faisions
au temps du Temple.
7
Qu’est-ce que le Maror ?
Par définition, le Maror est quelque chose d’amer.
Mais qu’est-ce que c’est ?
La Michna énumère cinq herbes qui conviennent.
8 Il y a quelques discussions sur la façon de traduire
les mots hébreu/araméen de la Michna,
9 mais il est généralement admis que la laitue
romaine, le raifort et la scarole sont inclus dans la liste.
La coutume ‘Habad est d’utiliser ensemble la laitue
romaine et le raifort.10
La Michna ajoute que la tige et les feuilles (si vous
utilisez une herbe à feuilles) peuvent être utilisées et
qu’elles peuvent être fraîches ou sèches. Le Talmud
souligne toutefois que cette permission pour les herbes
sèches ne concerne que la tige ; les feuilles doivent
être fraîches.11 Les herbes ne peuvent pas être
cuites, ni même trempées pendant 24 heures,12 c
ar cela leur ferait perdre leur goût amer.
Comment manger le Maror
Entrons à présent dans les détails spécifiques
de la consommation du Maror.
Pendant les soirs de Séder (un seul en Israël
et deux en diaspora), après avoir mangé la Matsa,
nous nous préparons à manger du Maror.
Nous prenons d’abord un kezayit
(le volume d’une olive) de Maror et le trempons
dans du ‘Harosseth,13 un mélange traditionnel
de pommes, de noix, de vin et d’autres ingrédients sucrés.
Cela fut instauré à l’origine pour tuer un ver
dangereux qui pouvait être trouvé dans les herbes.14
Certains disent que la raison pour laquelle nous le
faisons encore aujourd’hui est que le ‘Harosseth
ressemble au mortier que nous devions utiliser pour
construire les villes égyptiennes.15 Bien que nous
trempions le Maror amer dans le doux ‘Harosseth,
veillez à ne pas laisser le Maror trop longtemps dans
le ‘Harosseth afin de ne pas en diluer le goût, et
secouez-le immédiatement de sorte à en faire tomber
le ‘Harrosseth.
Une fois que cela est fait,
nous faisons la bénédiction Al Akhilat Maror
(« Béni sois-tu… qui nous a commandé de manger du Maror »).
Il n’est pas nécessaire de dire la bénédiction
de haadama, puisque nous l’avons déjà dite sur
le Karpas (les légumes que nous avons trempés
dans de l’eau salée).16
Une fois la bénédiction faite, mangez immédiatement
le Maror. On ne doit pas parler entre la bénédiction et l
a consommation du Maror. Si vous avez parlé,
s’il s’agissait d’un sujet qui n’était pas lié au repas,
répétez la bénédiction.17
Même si nous nous sommes penchés avec aise
toute la soirée lorsque nous avons bu notre vin
et mangé notre Matsa, nous ne nous inclinons
pas lorsque nous mangeons le Maror,18 bien
qu’il soit permis de le faire si on le souhaite.19
Dans l’idéal, le Maror doit être mangé en une fois.20
Si cela s’avère trop difficile, vous pouvez le manger
à votre rythme, à condition qu’il soit consommé
dans le temps imparti (environ 2 à 4 minutes).
Cependant, même si vous vous précipitez pour
manger votre Maror, ralentissez suffisamment
pour le mâcher, car goûter l’amertume fait partie
intégrante de l’expérience. L’avaler d’un coup
sans en sentir le goût ne compte pas.21
Deuxième prise
Après avoir mangé le Maror, les herbes sont
utilisées une fois de plus pour ce qu’on appelle
le Korekh, un sandwich composé de Matsa
et de Maror.22
Pour comprendre pourquoi
nous agissons de la sorte, il est nécessaire de
prendre un moment pour expliquer un désaccord
entre les rabbins sur la façon dont l’agneau
pascal, la Matsa et le Maror étaient consommés
à l’époque du Temple. La plupart des rabbins étaient
d’avis que chacun était mangé séparément.
Hillel, cependant, soutenait que l’on faisait un
sandwich avec les trois et qu’on les mangeait ensemble.
Pour satisfaire à toutes les opinions, nous faisons les deux :
nous mangeons d’abord la Matsa et le Maror séparément,
puis nous les mangeons ensemble sous la forme du
sandwich de Korekh.
Cela se fait comme suit : Premièrement, on prend
un kezayit de la Matsa et on le coupe en deux pour
faire les deux parties du sandwich (si vous avez un plateau du Séder, utilisez la troisième Matsa pour ceci23 ).
Ensuite, prenez un kezayit de Maror et placez-le entre
les deux tranches de Matsa. Il y a un débat dans la
Halakha sur la nécessité de tremper de nouveau le
Maror dans le ‘Harosseth. La coutume ‘Habad est
de le faire, mais ceux qui veillent à ne pas laisser
leur Matsa entrer en contact avec toute substance
humide devraient plutôt placer un petit morceau de
‘Harosseth sans vin sur le Maror.24
Dites ensuite : « Kène assa Hillel... »
(« Ainsi faisait Hillel a fait... »),
Comme indiqué dans la Haggadah, et mangez
ensemble la Matsa et le Maror tout en s’inclinant
à gauche en signe de liberté.25
Les leçons du Maror
Au début de cet article,26 nous avons énoncé
quelques points qui semblent difficiles à comprendre.
Premièrement, nous avons déclaré que le Maror n’est
qu’une « préparation » à l’agneau pascal. Pourquoi donc ?
Certes, la Torah les relie dans le verset, mais pourquoi
la Torah fait-elle dépendre l’un de l’autre ?
Nous avons alors dit que de nos jours, puisqu’il n’y a
pas d’agneau pascal, il n’y a pas de commandement
biblique de manger du Maror – et il n’y a donc aucune
raison de manger du Maror en souvenir de l’esclavage.
Au lieu de cela, nous le mangeons uniquement
pour nous rappeler du Temple. Encore une fois,
cela semble difficile à comprendre : du seul fait que
nous n’avons aucun commandement biblique,
nous ne devrions pas manger de Maror pour nous
rappeler l’esclavage ? Notre esclavage en Égypte
est sûrement une chose à retenir !
Pour comprendre cela, il est nécessaire de
prendre un moment pour analyser la nuit du
Séder et de s’engager sur la voie d’une meilleure
compréhension du Maror. Extérieurement,
le Séder semble divisé en deux parties distinctes.
Nous rassemblons d’abord notre famille et
racontons l’histoire de notre séjour en Égypte,
en revivant une nouvelle fois l’un des chapitres
les plus marquants de notre histoire. Ensuite,
lorsque cela est fait, nous retournons au présent
et accomplissons les mitsvas physiques de la nuit :
manger de la Matsa et du Maror. Ces deux parties
semblent avoir peu de relations l’une avec l’autre.
Le Rabbi de Loubavitch, Rabbi Mena’hem Mendel
Schneerson, de mémoire bénie, explique cependant
que ce point de vue est superficiel. Une fois que
nous commençons à analyser le Séder, nous réalisons
que ces deux parties partagent un fil conducteur ;
ce sont les deux actes d’une même pièce, œuvrant
de concert pour véhiculer le thème de la soirée du Séder.
Ce thème est le souvenir de l’Égypte. Tout d’abord,
nous nous asseyons pour le Maguid, l’étape du
Séder où nous faisons usage de la parole, de notre
créativité et de notre imagination pour raconter l’histoire
de notre esclavage et de notre rédemption. Mais cela
ne suffit pas. L’histoire est toujours confinée à notre esprit.
Alors, quand nous avons fini de raconter, nous prenons
les aliments de Pessa’h pour intérioriser ce sentiment
de liberté à travers nos actions mêmes. Lorsque nous
mangeons le Maror, le goût amer nous permet d’apprécier
les difficultés que nos ancêtres ont endurées et,
idéalement, si nous pouvions savourer l’agneau pascal,
sa riche douceur nous montrerait la liberté qui suivit.
C’est pourquoi le Maror est si important. Nous devons
sentir l’amertume de l’esclavage pour vraiment goûter
à la joie de la liberté. La liberté n’a pas de sens si l’on
ne s’est jamais senti confiné. C’est pourquoi le Maror
est considéré comme une préparation à l’agneau pascal :
son amertume permet d’apprécier la valeur
de l’agneau pascal.
De nos jours, cependant, nous n’avons pas la liberté
de l’agneau pascal. Nous sommes toujours confinés
à l’exil. C’est pourquoi l’amertume du Maror ne nous
donnera pas une plus grande appréciation de notre
liberté, car nous n’avons pas encore une telle liberté.
Au contraire : son amertume ne fait que souligner
davantage l’amertume de notre état actuel. C’est
pourquoi il n’existe plus de commandement de se
souvenir de l’amertume de l’Égypte.
Au lieu de cela, nous mangeons du Maror
uniquement en souvenir du Temple.
Points clé à retenir
- Aujourd’hui, le Maror est un décret rabbinique
institué pour nous rappeler le Temple. - Les herbes communément consommées pour
le Maror sont le raifort et la laitue romaine.
‘Habad utilise les deux. - Avant de manger le Maror, plongez-le dans
le ‘Harosseth puis secouez-le. - Faites seulement la bénédiction
al akhilat Maror et non haadama. - Vous n’êtes pas obligé de vous pencher.
- Mangez-le en 2 à 4 minutes.
- Mangez-le à nouveau entre deux morceaux de Matsa.