L’homme ne peut s’empêcher de se poser cette question.: DIEU EXISTE T-IL ? L'homme est qui se croit intellectuel fait souvent de
L'agnosticisme sans le savoir
Ce terme désigne ceux qui pensent qu’on ne peut se faire aucune idée de Dieu, et qui ajoutent qu’on ne peut savoir si Dieu existe ou non. Dieu est inconnaissable, il ne faut même pas se poser la question. Mais cette question demeure cependant l’une des plus fondamentales dans le cœur de l’homme.
Toutes les sociétés, d’ailleurs ont une religion. Il n’y a pas de société humaine sans divinité.
I. ARGUMENTS SOUTENANT QUE DIEU N’EXISTE PAS.
L’idée de Dieu serait une idée qui nous viendrait de l’inconscient.
Pour Freud, l’idée de Dieu est un transfert du sentiment filial. C’est un retour nostalgique à l’enfance où on était sous la protection d’un père, juste bon et tout-puissant. Freud déclare ainsi :
« La mort du père est la naissance de Dieu ».
L’homme se souvient parfois de l’impression terrifiante de la détresse infantile; face à cette angoisse, il ressent le besoin d’être protégé, d’où le recours à l’idée de Dieu. Pour la psychanalyse, Dieu et la religion, sont des illusions qui correspondent à un besoin. Cependant, s’abandonner au sentiment religieux pour Freud, c’est la régression vers un stade infantile :
« L’homme ne peut pas demeurer éternellement un enfant, il lui faut enfin s’aventurer dans un univers hostile ».
Pour Freud, la religion serait la névrose obsessionnelle universelle de l’humanité, elle dérive directement du complexe d’Œdipe.
II Dieu n’existerait pas, ce serait la projection décuplée de nos vertus.
L’homme projette ses qualités hors de lui, il les objective en un sujet fantastique, pur produit de son imagination. Telle est la thèse soutenue par Feuerbach (1804-1872) dans l’ouvrage L’Essence du Christianisme.. Pour Feuerbach, la religion serait « un vampire de l’humanité« . Le philosophe constate que toutes les déterminations de l’être divin sont des déterminations de l’être humain. Par exemple, on prête comme qualités à Dieu des attributs comme l’amour, la sagesse, l’intelligence, l’existence, qualités qui sont également en l’homme.
Cependant, sans la religion, sans l’adoration d’un dieu extérieur, l’homme n’aurait jamais eu qu’une conscience enveloppée, obscure, analogue à celle de l’animal.
Il a fallu à l’homme ce dédoublement, c’est à dire pratiquement se perdre pour se trouver.
Autrement dit pour Feuerbach, la connaissance de Dieu revient à une connaissance de soi : la conscience de Dieu est la conscience de soi de l’homme.
La religion révèle les trésors cachés de l’homme. Feuerbach entend ramener la religion à ses fondements anthropologiques.
III Dieu n’existerait pas, l’idée de Dieu nous serait inspirée par la peur de la mort.
L’homme, à cause de cette peur de la mort a toujours eu la nécessité d’une croyance en l’au-delà. On retrouve cette idée déjà dans les religions polythéistes de l’Antiquité. Ainsi dans la religion antique de l’Égypte, pour revivre le défunt doit d’abord se présenter devant le tribunal d’Osiris, le Dieu du monde des morts. L’âme des morts était pesée dans une balance et si l’homme durant sa vie avait mal agi, son âme était donnée en pâture à un animal monstrueux, mélange d’hippopotame, de crocodile et de lion. Si l’homme, au contraire avait bien agi, son âme était accueillie dans les champs d’Ialou (le paradis égyptien), où la déesse Nout donne l’eau vivifiante qui permet d’assurer la subsistance humaine pour l’éternité.
Dans l’Islam, il y a également l’idée de paradis. Le bouddhisme et l’hindouisme exorcisent l’homme de la peur de la mort par le système de la réincarnation. Dans le christianisme, il y a la croyance en la résurrection.
Le paradis chrétien toutefois est une conception différente des autres, dans la mesure où le paradis chrétien est purement spirituel. Ainsi comme il est dit dans l’Évangile selon Saint Mathieu et celui selon Saint Luc avec l’histoire de la femme aux sept maris. Des pharisiens interrogent le Christ pour savoir quel mari aura au ciel une femme sept fois veuve, et Jésus leur répond : « Vous vous égarez, faute de connaître les Écritures et la puissance de Dieu, en effet, on ne prend ni femme, ni mari, mais on est comme des anges dans le ciel ».
On pourrait donc penser que Dieu est une invention des hommes par peur de la mort, puisque toute religion suppose l’immortalité de l’âme. Cette idée hantait la conscience de l’écrivain Dostoïevski, qui était un chrétien tiraillé par le doute.
C’est pourquoi dans son roman Les Possédés, il met en scène un étrange personnage dénommé Kirilov. Pour Kirilov, Dieu est une création humaine , c’est la projection d’une hantise, celle de la mort. Pour libérer l’homme, il faut supprimer cette peur de la mort, et l’idée de Dieu disparaîtra, n’étant plus regardé désormais que comme un vieil anachronisme rétrograde. Kirilov décide donc de se tuer pour délivrer les autres hommes de la peur de la mort. Le personnage est convaincu que lorsque les hommes ne seront plus prisonniers de cette hantise, un type nouveau d’humanité surgira. Kirilov pense que son suicide philosophique va débarrasser le restant de l’humanité de la peur de la mort…
Ce qui est quelque peu stupide dans la mesure où nul ne revient de la mort ! Donc ce n’est pas parce que Kirilov se suicide, qu’il enlèvera aux autres hommes la peur de la mort !
IV D’autres pensent encore que la croyance en Dieu provient du besoin de se rassurer en général.
Ce serait l’instinct de survie, la peur de manquer qui expliquerait cette croyance en Dieu récurrente. Cette thèse est l’explication marxiste de la croyance en Dieu, comme l’explique le théoricien marxiste Michel Verret dans le Marxisme et la Religion :
« Il n’est pas de plantes ou d’animaux dont le besoin ou la peur n’ait fait des dieux. Le panthéon égyptien est une véritable ménagerie ».
Le rituel magique dans la religion a un rôle sécurisant. Les gestes d’incantation ou de prière nous libère de la tension nerveuse suscitée par la peur de l’inconnu. Ils compensent symboliquement les défaillances de la technique ou de l’action.
Ainsi dans les sociétés archaïques, comme on a des mauvaises armes, qu’on fait par conséquent de mauvaises chasses, on envoûte le gibier avant de partir.
« Les rituels sont des techniques malheureuses, nées des malheurs de la technique ».
L’action réussie va dissiper dans la pensée les fantasmagories de l’affectivité. On ne prie plus les dieux de la pluie quand on a de beaux canaux d’irrigation.
On ne va plus chez le guérisseur quand le médecin sait vous guérir.
Par ailleurs, Dieu peut prêter à l’ordre dominant le secours de sa toute-puissance et de son omniscience supposée. L’appareil des sanctions sociales humaines est nécessairement imparfait, le crime peut donc rester impuni.
D’ailleurs c’est l’espoir de tous les délinquants que d’échapper à la justice humaine.
Mais si on se met à penser que Dieu existe, et que c’est comme un œil absolu qui voient toutes les âmes et tous les péchés, alors au faible appareil des sanctions sociales s’ajoute alors l’infaillible système des sanctions métaphysiques.
Avec la croyance au paradis et à l’enfer.
Là pour les marxistes, l’idée de Dieu supplée la police, ainsi remarquent ils que dans les couches dominantes, l’intérêt religieux va de soi et se confond avec l’intérêt de classe. La foi chez les nantis procéderait de subtiles mécanismes émanant de la bonne conscience. Cela leur assure une aura morale sous couvert de défendre des intérêts universels.
Chez les pauvres, par contre la religion fait la sacralisation du sacrifice et leur inspire des vertus d’esclave : obéissance, résignation, humilité (vertus aimés des maîtres).
Par la religion, pour les marxistes, on suscite chez l’opprimé le consentement à l’oppression. La religion est donc pour les marxistes, née du besoin, c’est un garde fou social.
Pour eux, la religion ne justifie pas seulement l’oppression, elle en offre la compensation idéale.
En rêve dans un au-delà imaginaire où les pauvres prendront leur revanche sur le malheur. Le Paradis offre à un monde déchiré l’image du salut. La menace de l’enfer, le sentiment du péché, la valorisation du sacrifice, la dérivation céleste de l’espérance, font que les pauvres acceptent plus facilement l’oppression.
V L’idée de Dieu serait une création issue de notre lâcheté en général.
Ainsi pour Nietzsche, certains hommes ont forgé la fiction du péché et de Dieu, parce qu’ils ne pouvaient participer aux joies terrestres de la pleine satisfaction des instincts. Nietzsche s’en prend plus expressément au christianisme. Comme beaucoup d’hommes ne sont pas capables d’avoir le courage de suivre leurs instincts, ils ont inventé un autre monde pour pouvoir calomnier celui-ci et le salir. Dieu est donc pour le philosophe une idée morbide.
Ainsi, il remarque que la religion chrétienne se bat en faveur des déshérités et des condamnés de la vie. Pour Nietzsche, l’idée de Dieu est une idée tellement dégénérée qu’elle va jusqu’à être en contradiction avec la vie. Nietzsche voit en ceci quelque chose de décadent en inimitié avec la vie. Ainsi la chasteté est pour le philosophe la volonté du néant sanctifié. Aussi Nietzsche dans Ainsi Parlait Zarathoustra annonce « la mort de Dieu », il faut remonter la pente fatale, retrouver « le sens de la Terre« . L’homme n’a pas osé s’attribuer à lui-même des qualités supérieures, il en a fait les attributs d’un être surhumain qui lui est étranger. L’humain a deux sphères : 1) l’aspect ordinaire, pitoyable et faible (sphère humaine), 2) l’aspect rare, fort, surprenant (l’homme a attribué ceci à la sphère divine). Par conséquent, Nietzsche déclare « La religion est un cas d’altération de la personnalité ».
Mais il faut voir que quand Nietzsche utilise l’expression « la mort de Dieu », c’est une expression qui appartient à la théologie la plus traditionnelle, puisque la mort de Dieu désigne la mort du calvaire… donc quand Nietzsche déclare « nous sommes les assassins de Dieu », … il n’a rien inventé !
Pour Nietzsche, de plus, une fois « la mort de Dieu » réalisée, la sublime aventure du surhomme peut commencer avec l’invention de nouvelles valeurs au-delà du Bien et du Mal ! Dans cette perspective, il n’y a plus de Vérité : « La Vérité est une ombre du Dieu mort« . Les jugements moraux ne sont pas absolus et intemporels pour Nietzsche; ils sont relatifs à l’histoire de la société. Par ailleurs, Nietzsche reproche au christianisme d’avoir amolli l’homme en le consolant par un au-delà inexistant.
Sixième argument : Dieu n’existerait pas car il y a trop de mal sur Terre.
L’idée la plus difficile à affronter pour le croyant est en effet, la Réalité du Mal. Comment un Dieu tout-puissant et infiniment bon peut-il laisser l’Humanité dans le malheur ? L’auteur du monde se retrouve ainsi accusé. Et les révoltés comme Job s’écrie : « Il a fait le monde, il a mal fait, il aurait du mieux faire, il aurait pu mieux faire ! » Trop souvent, le monde n’est-il pas qu’une vallée de larmes et de misères ?
Épicure dans le fragment 374 voit bien toute la difficulté pour concilier l’existence de Dieu et la réalité du Mal. Face à cette difficile conciliation, il y a quatre possibilités :
1°) Dieu veut éliminer le mal, mais ne le peut (Il n’est pas tout-puissant).
2°) Dieu veut éliminer le mal, mais ne le veut pas (Autrement dit, Dieu est méchant ! )
3°) Dieu veut le mal ; mais de toute façon il ne peut l’empêcher (Dans cette troisième perspective, Dieu est non seulement impuissant, mais aussi méchant !)
4°) Dieu veut le mal pour éprouver les hommes et peut les en sauver ( unde malum ?)
Face à ce redoutable problème, les philosophes pour concilier l’existence de Dieu et la réalité du mal, ont procédé en général de deux manières.
A) Les philosophes ont dit qu’il n’y a pas réellement de mal dans le monde.
B) Les philosophes ont dit que Dieu n’est pas tout-puissant.
EXAMEN DE LA PREMIÈRE SOLUTION :
On dit que Dieu a fait le mal, mais de toute façon, il a bien fait. Le Mal, en effet, est nécessaire à l’existence corrélative du Bien. Ainsi, par exemple, les stoïciens ont dit que le Mal était nécessaire puisque sans lui le Bien n’existerait pas . Si l’homme ne pouvait pas faire le Mal, il n’aurait pas grand mérite à faire le Bien, comme le dit Denis Kambouchner (un ancien professeur de faculté) :
« Si on supprime la nature faillible, pécheresse de l’homme, on supprime du même coup toute possibilité de sagesse, d’héroïsme, de sainteté ».
Pour que le Bien existe vraiment, il faut qu’il y ait la liberté humaine de faire le Bien ou le Mal.
Pour les stoïciens, point de vertus sans vices. Nous admirons les actes courageux, généreux et héroïques, mais nous ne les révérions pas tant sans la constance des vices dans le cœur humain.
Pour Dieu, soit il créait un monde avec le Bien, mais avec sa fatale contre partie, le Mal.Soit Dieu créait un monde sans Bien, ni Mal , mais sans enjeu métaphysique : « Un Dieu bon qui voulait la gloire des juste devait aussi vouloir en toile de fond , le mal, sur laquelle se détache leur bonté »(Denis Kambouchner).
Évidemment, on peut objecter que pour la gloire de quelques uns, de quelques résistants; fallait -il une telle contrepartie, tant de mal sur Terre ?! Dieu est-il si bon qu’on le croit s’il ne veut réduire le Mal, mais seulement promouvoir le Bien ? Par ailleurs, le Bien que Dieu voulait produire ne pouvait-il pas suffisamment se différencier des conduites indifférentes ? Des individus neutres, tièdes ne suffisaient-ils pas , fallait-il, en plus les méchants et les monstres ? Le héros se distingue déjà du commun des mortels, avait-on donc vraiment besoin de gens très immoraux pour le reconnaître ?
Pour les stoïciens l’intérêt de l’existence du Mal, c’est de nous mettre à l’épreuve, Dieu peut ainsi tester la vaillance de ses serviteurs. Pour les stoïciens, même la douleur physique a une positivité, elle nous apprend à endurer. C’est ce que dit d’ailleurs Sénèque,, dans son ouvrage De la Providence, « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire« . Pour Sénèque, il n’y a pas de plus grand héroïsme que de pouvoir par ses vertus se rendre maître absolu de soi et des événements. Il faut des combats pour éprouver le juste. Mais les stoïciens n’étaient-ils pas trop présomptueux quand ils déclaraient pouvoir se rendre maître absolus d’eux-mêmes, ne se prenaient -ils pas eux-mêmes pour des Dieux ? N’avaient-ils pas un fol orgueil ?
II - UNE AUTRE SOLUTION
C’est la solution où l’on dit que Dieu n’est pas tout-puissant. Selon le Tout, dans sa globalité, le monde est juste et beau, mais pas dans les détails. C’est notamment la thèse de Leibniz, dans ses Essais de Théodicée. Leibniz nous dit dans ce livre qu’il ne faut pas considérer le monde, l’univers dans ses parties, ses détails (souvent assez répugnants) mais s’élever jusqu’au Tout (vraiment très beau). Les hommes se plaignent de Dieu et de l’ordre de l’Univers, parce qu’ils n’ont pas la vue assez étendue, ils manquent de hauteur de vue. Pour Leibniz, Dieu a créé le meilleur des mondes possibles; il a passé en revue l’infinité des mondes possibles, et dans son infinie bonté, il a forcément choisi le meilleur.
Ce meilleur des mondes n’existe pas sans le Mal;
car sans le Mal, le monde serait métaphysiquement moins riche, donc moins parfait. Car sans le Mal, la liberté humaine n’existe pas réellement. Dieu a donc créé le meilleur des mondes, celui dans lequel un peu de Mal permet le maximum de Bien.
Le Dieu de Leibniz n’est pas un Dieu tout-puissant, il ne peut pas aller à l’encontre des lois de l’Univers qu’il a produites. Dieu ne s’occupe pas des détails, mais le Monde est juste et bon dans sa globalité. Le problème, c’est que si ce détail, c’est un enfant torturé, ou encore un enfant touché par une maladie incurable .
Car malgré les raisonnements de Leibniz, le Mal demeure souvent un scandale.
Le calvaire du Christ n’est-il pas d’ailleurs le scandale des scandales ?!
Lui, l’homme le plus juste et bon que la Terre ait porté n’a t-il pas souffert horriblement dans sa chair et son esprit ? N’a t-il pas été traité comme le dernier des assassins ?! Et pourtant, dans la religion catholique, on nous dit que ce sacrifice était nécessaire « pour le rachat des péchés des hommes » .
Il y a dans cette perspective chrétienne quelque chose qui ressemble étrangement aux propos de Leibniz dans Essais de Théodicée, le détail de cette mort permet le salut de l’Humanité, un peu de Mal pour le maximum de Bien…
Cependant, malgré tous ces raisonnements, le mal reste un scandale. C’est ainsi que Camus dans La Peste fait s’exclamer ainsi son héros le Docteur Rieu : « Je refuserai jusqu’à la mort d’aimer cette création où des enfants sont torturés ». Camus, dans un passage très émouvant nous raconte en détail l’agonie d’un enfant contaminé par la peste, et c’est après le décès de cet enfant que le docteur Rieu se révolte contre Dieu et qu’il se conforte dans son athéisme, face à lui le prêtre Paneloux ne sait plus quoi lui répondre, à part qu’il continue à croire malgré l’horreur de la réalité et, peu après d’ailleurs le religieux est emporté à son tour par la peste ! On a aussi Stendhal qui face à l’ampleur du mal s’écrie : « La seule excuse de Dieu, c’est qu’il n’existe pas« . La réalité du Mal, en effet, est le plus grand argument des athées.
Cependant n’y a t-il pas dans la réalité des éléments qui impliqueraient l’existence de Dieu ?