Homélie du Père Gilbert Adam
« Six jours avant la Pâque, Jésus vint à Béthanie où habitait Lazare, qu’il avait réveillé d’entre les morts. »
On donna un repas en l’honneur de Jésus. Marthe faisait le service, Lazare était parmi les convives avec Jésus. Or, Marie avait pris une livre d’un parfum très pur et de très grande valeur ; elle versa le parfum sur les pieds de Jésus, qu’elle essuya avec ses cheveux ; la maison fut remplie de l’odeur du parfum. Marie brise le vase de parfum « de grande foi. » La qualité de ce parfum de grande confiance va se vérifier non pas quand on l’achète, mais lorsqu’on aura brisé le vase ! Cette signification mystérieuse du parfum de grande foi est la porte d’entrée de la grande semaine sainte. En ce lundi saint, l’Eglise médite le récit du geste de Marie de Béthanie qui apporte un vase de parfum précieux, signe de son amour pour Jésus. Ainsi, c’est avec grande Foi que nous entrons dans la Semaine Sainte, pour fêter bientôt le mystère pascal. Ce parfum qui embaume le corps du Bien Aimé en est le signe. L’onction de Marie manifeste l’entrée de Jésus dans sa Passion. Son geste est prophétique, c’est le geste de l’Amour qu’elle accomplit et qui révèle déjà le drame qui va bientôt arriver. Jésus sera crucifié et mis au tombeau. A l’avance, elle embaume le corps de son Bien Aimé. L’Époux va « entrer dans sa gloire. » Il ne s’y avance pas sans son Épouse à ses côtés. Marie, la mère de Jésus, s’efface devant Marie de Magdala qui surviendra encore au matin de Pâques.
"Judas Iscariote, l’un de ses disciples, celui qui allait le livrer, dit alors : « Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum pour trois cents pièces d’argent, que l’on aurait données à des pauvres ? »
Il parla ainsi, non par souci des pauvres, mais parce que c’était un voleur : comme il tenait la bourse commune, il prenait ce que l’on y mettait. Judas l’Iscariote dénonce durement le geste de Marie, sans même faire mention d’elle. Ses propos illustrent une accusation inacceptable. Il cache une immense jalousie derrière des motifs « religieux et humanitaires ! » En ce début de semaine sainte, un homme et une femme manifestent comment l’humanité traverse l’accusation et la férocité du monde pour rejoindre l’éternelle beauté de l’humanité donnée en Jésus. La foi chrétienne est une connaissance amoureuse du Christ Jésus, qui dans sa mort, nous révèle l’amour du Père pour toute l’humanité. Jésus, le jeudi saint, lavera les pieds de ses disciples. Celui qui se laisse saisir par l’amour du Christ et lui donne tout son amour, lave les pieds de ses frères. C’est ce refus qu’exprime Judas qui, après sa trahison, ira se pendre. Il refuse de s’ouvrir à l’Amour de Jésus. Nourris de la Parole de Dieu, nous entrons avec une foi nouvelle, d’un grand prix, qu’on ne peut pas trafiquer, à la suite de Jésus.
"Jésus lui dit : « Laisse-la observer cet usage en vue du jour de mon ensevelissement ! Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous, mais moi, vous ne m’aurez pas toujours. »"
Or, une grande foule de Juifs apprit que Jésus était là, et ils arrivèrent, non seulement à cause de Jésus, mais aussi pour voir ce Lazare qu’il avait réveillé d’entre les morts. Les grands prêtres décidèrent alors de tuer aussi Lazare, parce que beaucoup de Juifs, à cause de lui, s’en allaient, et croyaient en Jésus. Nous sommes devant le désir de Marie et de Marthe d’aller à la suite de Jésus qui nous sauve. Ce désir correspond au désir de l’humanité pour son Dieu, elle le suit avec tout l’amour qui est contenu dans ce désir. Toute femme est appelée à rejoindre l’Époux qui vient, à témoigner de son amour pour lui en venant en aide aux pauvres ! Marie de Béthanie oriente notre attention sur la personne humaine, corps et âme. Elle est évoquée par des gestes forts, l’onction du corps de Jésus au moyen de l’huile parfumée. Elle baigne de parfum les pieds de Jésus pour magnifier son corps de Fils, d’Époux et de Christ. Jésus lavera les pieds des siens afin qu’ils « aient part » à toute la joie du matin de Pâque. S’il y tant de souffrances dans le monde, tant de guerres, c’est parce que l’humanité a perdu la joie de sa tendresse, la joie d’aimer Dieu. La tendresse de l’amour de Dieu pour nous est vraiment extraordinaire ! Elle nous aide à garder nos cœurs purs et à demeurer dans l’amour des autres. Quand nous regardons le tabernacle dans lequel Jésus rayonne, nous comprenons combien il nous aime. Il accomplit le Salut en nous sauvant sur sa Croix. Il sera élevé dans la gloire du Père. Marie, la Mère de Jésus, porte tout cela dans le silence de son cœur.
moniale bénédictine
Clément, les moniales de Wisques et B. de Vregille, éd. du Cerf, 1978, p. 227, 229, rev.)